Je me sens effectivement un peu pratiquement comme la mère qui au Moyen-Âge donna naissance à un bébé grand et maigre, frêle et élancé, incapable assurément de survivre plus d’une heure dans la forêt des loups :
- L’enfant que j’ai enfanté est faible et fragile, qu’elle s’était dit. Avec la forêt juste à côté, jamais il ne pourra vivre plus de vingt ans. C’est un gâchis que je viens de sortir là, de mon ventre, tuez-le puis engrossez-moi encore afin que je procrée quelque chose de plus durable.
Le mien s’appelle Zoïc. Il n’est pas fragile. Côté physique, ça va. C’est du côté cérébral que ça cloche. Il n’a même pas encore cinq ans que, déjà, on lui prescrit des pilules. Le docteur dit qu’il a un déficit de l’attention et qu’il vaut mieux agir vite. C’est vrai que mon bébé n’est pas une lumière. Quand je lui demande comment s’appelle sa mère, ça lui prend au moins dix secondes avant de me répondre. J’ai chronométré. C’est évident, je pense, qu’il ne fera jamais un ingénieur. Il est destiné à des métiers de base. Il fera peut-être pompier, ou livreur de pizza. Dans le meilleur des cas, il sera dans le quatrième trio d’une équipe de hockey.
Le pire, dans tout ça, c’est que son père refuse de lui donner les pilules prescrites par le docteur. Je n’arriverai jamais à faire de mon fils un génie si le père le laisse vivre en parfait être humain libre de tout médicament. C’est évident que le père comme l’enfant n’est pas plus intelligent qu’une taupe dans un volcan. Le père pense que son enfant n’est pas débile et l’enfant agit comme s’il ne l’était pas.
- Il a une intelligence différente de la nôtre, dit le père, rien de plus, rien de moins, et si l’évolution de l’humain a décidé qu’il devait naître comme ça sur terre, c’est parce qu’il faut le laisser vivre ainsi. Si on s’efforçait moindrement à étudier les richesses intellectuelles de notre enfant plutôt que d’essayer de le normaliser, on pourrait avoir des surprises.
Non. Notre enfant a des problèmes comme tous les autres, preuves à l’appui : il n’écoute pas en classe. Il ne fait pas ses devoirs. Il a un déficit de l’attention. Son père aura beau dire que s’il y a aujourd’hui beaucoup d’hommes frêles et élancés c’est en partie à cause du premier enfant qui, au Moyen-Âge, naquit frêle et élancé, je refuse de croire que mon enfant ouvrira la porte sur une génération d’humains infectés du déficit de l’attention.
Je me fous pas mal que mon petit Zoïc dise qu’il est capable de sentir les couleurs, que le bleu goûte le bleu, que le noir sente le noir; qu’il soit capable de lire les sentiments au travers des personnes, qu’il ait une intelligence émotive extrême je m’en fous. Il est bon dans tout ce qui ne paye pas. Qu’est-ce que ça peut me faire, à moi, que mon enfant soit le plus généreux de sa classe? Ce n’est pas comme si la générosité allait lui faire gagner de l’argent.
Moi je pense qu’il existe dans chaque enfant un cerveau que nous ne sommes pas à même de comprendre et que nous aurions avantage à le faire taire à coups de pilules, ce cerveau, sous prétexte qu’il présente des troubles d’attention ou autres; le droguer sans cesse, afin que jamais l’évolution ne s’écarte de notre normalité à nous, et que jamais la richesse de ce que nous ne comprenons pas ne s’ouvre sur un lendemain qui n’est pas celui où nous sommes morts. Amen.
- L’enfant que j’ai enfanté est faible et fragile, qu’elle s’était dit. Avec la forêt juste à côté, jamais il ne pourra vivre plus de vingt ans. C’est un gâchis que je viens de sortir là, de mon ventre, tuez-le puis engrossez-moi encore afin que je procrée quelque chose de plus durable.
Le mien s’appelle Zoïc. Il n’est pas fragile. Côté physique, ça va. C’est du côté cérébral que ça cloche. Il n’a même pas encore cinq ans que, déjà, on lui prescrit des pilules. Le docteur dit qu’il a un déficit de l’attention et qu’il vaut mieux agir vite. C’est vrai que mon bébé n’est pas une lumière. Quand je lui demande comment s’appelle sa mère, ça lui prend au moins dix secondes avant de me répondre. J’ai chronométré. C’est évident, je pense, qu’il ne fera jamais un ingénieur. Il est destiné à des métiers de base. Il fera peut-être pompier, ou livreur de pizza. Dans le meilleur des cas, il sera dans le quatrième trio d’une équipe de hockey.
Le pire, dans tout ça, c’est que son père refuse de lui donner les pilules prescrites par le docteur. Je n’arriverai jamais à faire de mon fils un génie si le père le laisse vivre en parfait être humain libre de tout médicament. C’est évident que le père comme l’enfant n’est pas plus intelligent qu’une taupe dans un volcan. Le père pense que son enfant n’est pas débile et l’enfant agit comme s’il ne l’était pas.
- Il a une intelligence différente de la nôtre, dit le père, rien de plus, rien de moins, et si l’évolution de l’humain a décidé qu’il devait naître comme ça sur terre, c’est parce qu’il faut le laisser vivre ainsi. Si on s’efforçait moindrement à étudier les richesses intellectuelles de notre enfant plutôt que d’essayer de le normaliser, on pourrait avoir des surprises.
Non. Notre enfant a des problèmes comme tous les autres, preuves à l’appui : il n’écoute pas en classe. Il ne fait pas ses devoirs. Il a un déficit de l’attention. Son père aura beau dire que s’il y a aujourd’hui beaucoup d’hommes frêles et élancés c’est en partie à cause du premier enfant qui, au Moyen-Âge, naquit frêle et élancé, je refuse de croire que mon enfant ouvrira la porte sur une génération d’humains infectés du déficit de l’attention.
Je me fous pas mal que mon petit Zoïc dise qu’il est capable de sentir les couleurs, que le bleu goûte le bleu, que le noir sente le noir; qu’il soit capable de lire les sentiments au travers des personnes, qu’il ait une intelligence émotive extrême je m’en fous. Il est bon dans tout ce qui ne paye pas. Qu’est-ce que ça peut me faire, à moi, que mon enfant soit le plus généreux de sa classe? Ce n’est pas comme si la générosité allait lui faire gagner de l’argent.
Moi je pense qu’il existe dans chaque enfant un cerveau que nous ne sommes pas à même de comprendre et que nous aurions avantage à le faire taire à coups de pilules, ce cerveau, sous prétexte qu’il présente des troubles d’attention ou autres; le droguer sans cesse, afin que jamais l’évolution ne s’écarte de notre normalité à nous, et que jamais la richesse de ce que nous ne comprenons pas ne s’ouvre sur un lendemain qui n’est pas celui où nous sommes morts. Amen.
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