29 mars 2010
L'éternel Luxias
26 mars 2010
Jogue ou l'homme-marteau
Parodie : Vincent Filion
Suicidaires
Votre vie sociale au 87 rue Sackville
Ma réalité perdue
Le squelette écrivain
Vin rouge fraise
23 mars 2010
Les charlottes
17 mars 2010
Une mort de la littérature
La douche froide
Asthmatisme
11 mars 2010
Le passeur d'aspirateur
Sang d'encre (Mémoire no. 1666)
Je n’ai jamais lâché les barreaux de l’échafaudage. Je me suis hissé jusqu’au troisième étage. Une fois sur le madrier, j’ai tracé une ligne droite sur le mur de l’immeuble. J’ai soulevé une poutre d’acier et je l’ai ancrée dans la brique. J’ai pris d’autres mesures. J’ai ancré une autre poutre, puis une autre. Je suis redescendu. J’ai rangé mes outils. J’ai quitté le chantier. J’ai tourné à gauche. J’ai pris la 15 sud. Je suis sorti de ma voiture. J’ai ouvert le coffre-arrière. J’ai sorti un trousseau de clés de ma boîte à lunch. J’ai fermé la portière. J’ai salué ma voisine. J’ai enlevé mon pantalon. Je me suis regardé nu dans le miroir. J’ai ouvert les robinets. J’ai passé ma main sous l’eau chaude. Je me suis rincé les cheveux. J’ai laissé le jet d’eau caresser mon front. J’ai crier à mon chien de venir me rejoindre. J’ai regardé ses griffes sur mes genoux. Je suis retourné à la salle de bain. J’ai savonné les poils de mon chien.
J’ai frotté l'assiette. Je l’ai rincée pour qu’il n’y ait plus de mousse. J’ai pris une autre assiette. Je l’ai frottée mais je ne l’ai pas rincée. Je me suis dit que j’avais assez rincé pour aujourd’hui. J’ai balancé l’assiette par dessus les autres assiettes. J’ai pris d’autres assiettes. Je les ai ajoutées à la pile sans même les frotter. J’ai pris un couteau. Je l’ai regardé longtemps. J’ai glissé la lame sur la paume de ma main. J’ai tracé une croix sur la paume de ma main.
Mon patron m’a téléphoné. J’ai déposé le stylo sur la table et je lui ai dit que je n’oublierais pas demain.
J’ai repris le stylo. J’ai couru jusqu’à ma chambre. J’ai pris mon carnet. J’ai couru jusqu’au salon. Ma jambe s’est accrochée sur le coin du divan-lit. J’ai déposé le stylo sur la table.
Ça n’arrêtait pas de saigner. J’ai collé deux diachylons sur la paume de ma main. Les diachylons en forme de croix se décollaient chaque fois que je fermais le poing.
J’ai rincé le couteau. Je me suis dit que j’avais assez rincé pour aujourd’hui. Je me suis dit que je m’étais déjà dit la même chose auparavant. Je ne savais plus si c’était la veille ou la journée même, mais je savais que je me l’étais dit. J’ai pris un stylo. J’ai couru jusqu’à ma chambre et j’ai pris mon carnet. J’ai noté qu’il ne fallait pas oublier.
J’ai lu qu’il ne fallait pas oublier. Dans mon carnet, c’était écrit que je n’étais pas rentré au travail ni aujourd’hui, ni la veille. J’ai téléphoné à mon patron. Je lui ai dit que je n’oublierais pas demain. J’ai jeté les diachylons à la poubelle et j’ai tracé une nouvelle croix dans ma main.
J’ai déposé le stylo sur la table. J'ai rincé mon couteau. J'ai vu mon sang noir. J'ai retiré l'encre de ma main en grattant avec le couteau. J'ai rincé mon couteau. Mais sans faire exprès, j'ai aussi rincé mon stylo. Il n'a plus écrit.
J'ai couru jusqu'à ma chambre. J'ai pris un nouveau stylo. J'ai cherché mon carnet mais je n'ai pas trouvé. Ma jambe s'est accrochée.
J'ai déposé le stylo sur la table. C’est à ce moment-là que mon patron m’a téléphoné :
- T’es pas rentré hier, t’’es pas rentré aujourd’hui...
- Je suis occupé! Je vous rappelle plus tard!
J’ai eu du sang qui a coulé du combiné ou de ma jambe. Je ne me souviens plus. J’ai couru jusqu’à ma chambre. J’ai pris un diachylon. Je me suis dit qu’il faudrait plutôt deux diachylons. Puis je me suis dit qu’il faudrait d’abord rincer. J’ai rincé ma main. J’ai dû crier dans le téléphone.
- Qu’est-ce qui se passe?!
- Je vais vous laisser maintenant! Je suis occupé!
J’ai rincé ma main et j’ai pris soin de me souvenir de ne plus jamais la rincer. J’ai clairement écrit dans mon carnet : ne te rince plus la main William. Je me suis dit qui parle? Je me suis dit William et mon patron a répondu au même moment :
- Michel. Tu oublies toujours mon nom...
Je lui ai dit que je n’oublierais pas demain. J’ai fait une croix dans ma main. Du sang a coulé sur mon pantalon. Je l’ai enlevé. Je me suis regardé longtemps dans le miroir. Je me suis rincé les cheveux. En rinçant mes cheveux, je me suis rincé les mains. Je suis sorti de la douche aussitôt. J’ai couru jusqu’au divan-lit. Je me suis dit qu’il fallait dormir. J’ai crié à mon chien de venir me rejoindre. Il m’a griffé les genoux. Je l’ai flatté. Des gouttes d’encre ou de sang ont taché son toupet. Je suis retourné à la salle de bain.
Je me suis rincé les mains en lui rinçant le poil. Je me suis dit que j’en avais assez. J’ai couru trouver mon carnet. Je l’ai cherché longtemps. J’ai pris le stylo qui se trouvait déjà dans ma main. J’ai réécris ma vie, en commençant par l’échafaudage d’où je ne suis jamais tombé. Je me suis supplié d’arrêter de parler. Je me suis demandé d’arrêter d’écrire. Je me suis demandé qui parle?
Et c’est là que j’ai répondu Michel. Et c’est là que je me suis fait une croix...
9 mars 2010
Salade de fruits
Six : Comment te sens-tu?!
Pol : Athée.
Six : Athée? Depuis quand?
Pol : Ma naissance.
Six : Bouddha a manqué son coup?
Pol : Je ne sais pas. C’est entré, je l’ai senti et c’est sorti.
Six : Mais ta philosophie?
Pol : Un peu de tout. Une salade de fruits.
Six : Et le melon d’eau?
Pol : Des préjugés.
Six : Juteux mais vides mais... la moquerie?
Pol : Les kiwis! Le semblant d’amis!
Six : Haha! Fraise!
Pol : Les filles. Ça se cueille!
Six : Et le malheur des filles...?
Pol : Les raisins. Ceux qui ont des pépins...
Six : La déception?
Pol : Ceux qui sont secs!
Six : Petit et mou?
Pol : Une banane plantain?
Six : Les avocats?
Pol : Les oranges sanguines, elles sont chères et on leur suce le sang.
Six : Mais les fraises?
Pol : Ce sont les enfants qui les sucent.
Six : Les pédophiles?
Pol : Poivron, concombre, tomates, les fruits que les vieux nous font avaler...
Six : Le cantaloup!
Pol : La pomme d’Adam. Celle que les hommes ont.
Six : Les zom zon...?
Pol : Caramboles!
Six : Étoiles que les femmes n’ont plus parce que volées par les scientifiques!
Pol : Cybole?
Six : Un sacre.
Pol : Piquante?
Six : L’ananas, femelle?
Pol : Non.
Six : Le piment piquant, mais femelle.
Pol : Noix de coco!
Six : Une tête brune poilue, la tête d’un singe qu’on fracasse avec un clou et un marteau... Les primates martyrisés!
Pol : Presque.
Six : L’intelligence artificielle!
Pol : Pomélo!
Six : Le nom d’un robot!
Pol : Goyave!
Six : Le nom d’un peintre robot.
Pol : Alejandro.
Six : Le nom de ton frère en espagnol.
Pol : Ève.
Six : La pomme qu’elle a perdu et que personne ne veut retrouver?
Pol : La pomme grenade!
Six : Et la couleur de ses cheveux?
Pol : Carotte.
Six : Non!
Pol : Châtaigne?
Six : Et la chérie d’Adam?
Pol : La chérimole.
Six : ...Euhm... Groseille?
Pol : Si j’en avais un dans ma main, je serais borgne...!
Six : Cyclope!
Pol : Un pop sicle?
Six : Non, un monstre à l’oeil unique. Kiwano?
Pol : Un écrivain japonais sans kimono.
Six : Pepino.
Pol : Le nom de mon chien?
Pol : Ramboutan. Le nom du tien?
Six : Rataplan?
Pol : Faute.
Six : Pepino?
Pol : ...Bettacarde!!!
Six : Ah! toujours celle-là... Bon t’as gagné...
8 mars 2010
François et Mirandole : Le bouquet
Mirandole : C’est ma fête?
François : Non... Je parle à ma table! Un peu plus à droite le bouquet, chérie?
Mirandole : Ça lui fait quel âge?
François : Trois ans. Plus à droite encore? Mais ça ne sera pas centré...
Mirandole : Elle ne les fait pas...
François : C’est parce que j’en prends bien soin! Tu ne préfères pas que le vase soit centré?
Mirandole : Elle a l’air d’au moins dix ans! Non je ne préfère pas centré. Mais elle n’était pas une antiquité quand tu l’as achetée?
François : ...Non, elle était neuve. C’est toi qui l’abîmes toujours avec ton trousseau de clés. Le bouquet paraît plus symétrique lorsqu’il est centré, non?
Mirandole : Mes clés n’abîment rien, je ne les bouge jamais... Moi, je placerais plutôt le vase dans un coin de la table. C’est plus joli.
François : Dans un coin de la table? Si tu le dis, chérie... Mais c’est très dangereux. Mirandole pourrait le renverser et...
Mirandole : Tu le mets où, toi, ton trousseau de clés quand tu reviens de travailler?
François : Sur le divan? Mais non, ça ne va pas là!
Mirandole : Dis-moi la vérité...
François : Bon, d’accord, sur le divan...
Mirandole : Sur le divan? Mon divan le mien? Moi qui croyais que c’était le chat qui l’abîmait...!
François : Le chat y monte toujours. Il veut toujours jouer et il fait tout tomber...
Mirandole : Mais c’est en jouant avec ton trousseau qu’il déchire mon divan!
François : On va l’essayer, d’accord?
Mirandole : D’accord, si tu veux... J’ai mis ton trousseau sur le divan. Mais le chat ne vient pas.
François : Si ça tombe, ça ne sera pas de ma faute...!
Mirandole : Ça sera la faute du chat mais... Tu fais quoi avec ton vase? Pourquoi tu le mets sur mon divan?!
François : Ma table a dit qu’elle voulait le bouquet sur le divan. Toi, qu’est-ce que tu fais avec mes clés?!
Mirandole : Je fais un test. Tu ne m’écoutais pas?! Ha! Attends une seconde!... Peux-tu répéter chéri?
François : ? Mon chéri?... Je t’ai dit de lâcher mon trousseau.
Mirandole : Tu veux que je le laisse tomber par terre?
François : Oui, redonne-le!
Mirandole : Mais François sera en colère...
François : ? Mais t’es fou!
Mirandole : Oops, le vase...
François : Mon bouquet! Tu l’as fait tomber par exprès!
Mirandole : Mais non, c’est mon divan qui m’a dit de le faire...