1 juin 2009

Je veux vivre





I

Des soirs je veux vivre et profiter de chaque seconde, chaque fraction, chaque nano et le temps implose dans ma tête. Des barrières sautent. Et je me retrouve au milieu de l’horloge en train de rire.

Je crie je veux vivre mais avez-vous déjà essayé. Crier je veux vivre. Quand on le crie, on réalise que si on le crie, c’est qu’on vit pas. Comme quand on crie je veux du gâteau. Si on le crie. C’est qu’on l’a pas. Et c’est toute la tristesse de jamais avoir eu de gâteau quand on l’a désiré comme aux anniversaires et ce que j’ai à dire sur les anniversaires.

II

Je sais ma mère a essayé de m’apprendre à vivre je sais mon père le dit. Elle a pas échoué sur toute la ligne, mais il me reste de l’apprentissage de ma mère que le désir de vivre toujours plus. Un désir qui ressemble à celui des parachutes. Ceux qui sautent. Ceux qui veulent vivre à l’extrême. Et peut-être mourir en même temps. 

Les parachutistes disent que de sauter les fait vivre. Mais chaque fois qu’ils sautent, l’idée d’un fil cassé. Un tissu qui s’emmêle. Ça les réjouit. C’est comme défier la mort. Et je sais pas c’est quoi l’art, mais je crois que ça c’est de l’art parce que je suis pourri en parachute.

III

Quand je crie je veux vivre, je défie la mort. Je confronte. Et je dis viens me chercher. Et je ris chaque fois qu’elle échoue. Elle échoue comme ma mère. Ma mère, la mort, c’est pareil. Elle m’a mise au monde et maintenant elle ferait tout pour me ravoir dans son ventre. Elle m’a mise au monde et maintenant elle me guette. Elle me regarde vivre et elle m’espère.

Ce qu’elle fait pour mieux m’espérer... Elle se soûle toutes les nuits pour pleurer mon nom. Et quand je reviens à la maison, elle pleure encore mon nom et l’alcool le la le lui sort par les trous de nez je crois, vraiment qu’elle a trop bu cette fois. Je lui retire l’oreiller. T’as pas droit à l’oreiller. Tu mérites pas.

IV

Je sais pas si ça débouche. Des soirs j’écris chaque seconde, chaque fraction, chaque nano et le temps entre mes deux oreilles. Je sais pas si ça débouche. Ça débouche vers où.

V

C’est quoi ton courant préféré en peinture?

VI

Je me soûle toutes les nuits pour mieux entendre ma mère. Parler à quelqu’un de soûl alors que vous êtes à jeun avez-vous déjà essayé. C’est comme la mort vous parle. Elle dicte les dix commandements : replace mon oreiller ; apporte-moi un verre d’eau ; dis-moi que tu m’aimes ; serre-moi dans tes bras ; sers-moi un autre verre de vin ; chante-moi une chanson ; danse avec moi ; laisse-moi t’embrasser ; vas pas te coucher! ; où sont mes cigarettes!

Tes cigarettes je les ai fumées.

VII

Des soirs je veux fumer un paquet de cigarettes en trente minutes alors je me lance une deux je tousse trois! Et j’arrête je me demande si ça débouche je me débouche une bière une autre DES SOIRS je veux boire douze bouteilles en une soirée je débouche je débouche je débouche et je ris comme un fou.

VIII

ENLÈVE L’OREILLER TON OREILLER TU MÉRITES PAS ARRÊTE, ARRÊTE DE ME REGARDER DE M’ESPÉRER DÉ ZÉ ENLÈVE TON DÉZÉ SPÉRÉ SPOREILLER NON PAS DE VERRE D’EAU TU BOIS, PAS SERRE-MOI PAS DANS TES BRAS SERRE-MOI, PAS UN AUTRE VERRE DE VIN J’AI DIT POISSON CRU je dis POISSON CRU je la traite de POISSON CRU QUE JE DIS

IX

Des espaces évolués dans les craques du divan c’est comme ça que j’écris ; des espaces dévolués dans les c’est-pas-grave de divan et ma mère ; dévoluée sur le divan.

- Tu sais Charlotte! C’est pas important de vouloir vivre! L’important c’est de vivre, ça je me rappelle c’est un type comment il s’appelait oh je ne me souviens plus comment il s’appelait, très barbu très très enjoué lorsqu’il parlait ça faisait beaucoup de oh tout le monde le regardait tu sais comment il s’appelait... oh je sais ça va me revenir mais ça ne me revient pas argh je sais ça me reviendra, bon, ça me reviendra, ce type, disait c’est pas important de vouloir vivre! L’important c’est de vivre, ça je me rappelle vraiment, Charlotte, ce type comment il s’appelait tu le sais toi Charlotte, tu le sais dis-le, je sais que tu le sais oh décidément, j’ai une mémoire de poisson non mais, ça fait plus de dix années de ça il faut dire, j’ai pu oublié quelques trucs mais je t’assure, ce type très très barbu et très enjoué disait que l’important c’était de vivre oh je ne me rappelle plus qui, très très enjoué en tout cas il m’a fait beaucoup rire!

- ... (ça c’est moi qui répond trois-petits-points en voulant dire non mais...)

Et puis j’ai dit NON MAIS. Et après rien avez-vous déjà essayé. De dire non mais et puis rien. Juste non mais. Vous avez déjà essayé. Et ça n’a rien donné. Mais votre mère s’est couchée.

X

Ma mère quand elle se couche c’est la vie qui renaît. Je me sens l’espoir de vivre. Elle va se coucher et enfin la normale. Je veux tout normal. Des esprits normaux m’habitent. Ils me scandent la normalité. Ils me dictent les dix commandements normaux pas besoin de les répétés. Ils sont normaux. Et je suis normale. Et je suis normale! J’ai deux parents qui s’aiment et la maison et rien de détruit rien de défait tout s’aime tout s’aime et la santé! La santé! Alors que je suis normale! Et ma mère couchée! Je crie enfin je veux vivre! Je veux vivre! Et je crie jusqu’aux majuscules JE VEUX VIVRE! Jusqu’aux parachutes et je me dis ça y est, je vais sauter. Je vais sauter. Je vais sauter. JE SAUTE JE VEUX VIVRE!

Et merde je la réveille.

1 commentaire:

William Drouin a dit...

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