3 juin 2009

Écris






J’ai besoin de parler. Je n’ai pas besoin d’écrire, j’ai besoin de parler. C’est con les gens qui disent j’ai besoin d’écrire. On n’a jamais besoin d’écrire : on a besoin de parler. Et ceux qui tardent à écrire, c’est qu’ils n’ont pas envie de parler. Et ceux qui lisent n’ont pas envie d’écrire donc qu’ils se taisent.

Moi je parle. Je parle toujours. J’ai toujours envie de parler. Alors j’écris toujours et si je suis prolifique, ce n’est qu’à cause de ça... Peut-être que j’aime m’écouter parler. M’entendre parler...

Quand j’écris, je n’écris pas, je m’écoute écrire. Cela fait dans ma tête de nombreuses phrases que je me dicte à mi-voix, référant aux voix que j’ai déjà entendues. Celles de ma mère ; celles de mon père ; les voix s’entremêlent et c’est ça, le plaisir d’écrire : c’est le plaisir de parler en silence.

Dans le silence le plus parfait, crier alors que personne n’entend. Virer fou alors que personne ne vous voit. Tentez-le. Essayez-le. Je ne vois pas pourquoi tant de gens brillants (vous) n’écrivent pas. Cela fait dans vos têtes de nombreuses phrases référant aux voix que vous avez déjà entendues. Celles de vos mères ; celles de vos pères ; les voix s’entremêlent ce n’est que ça. Le plaisir d’écrire. Ce n’est que ça.

Je publierai un premier roman intitulé Plus écrivain que mort et alors, m’écouterez-vous davantage? Je débranche le téléphone.

J’ai besoin de parler. Je n’ai pas besoin d’écrire. Pourtant j’écris sans cesse. Les mots tapés sont autant de lettres que de laisse-moi réfléchir.

Son autant de lettres que d’écho de silence.

Je préfère que de laisse-moi réfléchir : les mots tapés sont autant de lettres que de laisse-moi réfléchir.

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Je ne veux ici que prouvez que je suis capable de faire les deux : à la fois grande poésie, à la fois grande simplicité d’âme. 

« Sont autant de lettres que d’écho de silence » étant de la grande poésie, j’ajoute aussitôt que je préfère « sont autant de lettres que de laisse-moi réfléchir ». 

C’est ce que j’essaie de prouver. 

2

Écrivez. Qu’est-ce que vous attendez. Je suis là devant mon ordi et je ne vois que les mots les miens qui se profilent mais les vôtres demeurent inconnus non lus absents comme de l’humeur absente.

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« Absents comme de l’humeur absente », mes contemporains jugeraient cela comme de la riche poésie alors que je la juge moyenne.

Réfutons-la avec de la simplicité :

« Absents comme toi absente », pourquoi pas.

3

Peu importe si vous écrivez à propos de la séparation de vos parents, de manière très sobre et très fade, peu importe si vous écrivez à propos de vos ressentiments de cette époque ; peu importe si vous écrivez sur la non-séparation de vos parents toujours ensemble et qui s’aiment, de manière très laide et très fausse, peu importe si vous écrivez à propos de votre fierté grasse de l’époque actuelle ;

Mais écrivez, tous, avant que la mort m’ouvre la bouche.

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« Avant que la mort m’ouvre la bouche », pourquoi pas. Selon mes contemporains, ce serait de la grande poésie.

Réfutons-la simplement :

« Avant que la mort me pisse aux lèvres », bah oui d’accord.

4

La poésie est une chose simple que seuls les simples peuvent produire. Les compliqués (ceux qui écrivent des dissertations super complexes avec des phrases complexes, gennnnnreeee dissertation sur la littérature de telle époque que tout le monde s’en fout parce que tout le monde meurt) sont incapables de la produire. Réjouissons-nous.

Car il faut se réjouir 
De la moindre entrave 
À l’habitude du creux
Lequel on se creuse sans cesse

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« Car il faut se réjouir
De la moindre bla bla
Bla bla bla
Lequel bla bla bla », bon d’accord pas d’accord.

Oui ça va j’ajoute.

« Car il faut se réjouir
comme le sourire
d’un dessin d’enfant », ça c’est meilleur.

5

Après tout cela je n’ai point de certitude que vous écriviez quoi que ce soit de valable, mais certes certitude que vous écrirez quelque chose ; et ce quelque chose sera à tout le moins quelque chose ; « Quelque chose, n’est-ce pas tout ce dont nous sommes avides? » (ça c’est riche)

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« Quelque chose n’importe quoi 
quelque chose de l’fun
rien de trop morose
pis on verra après

je le dis ce le c'est » 

(ça c’est pauvre mais 40 fois meilleur)

1 commentaire:

William Drouin a dit...

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