27 octobre 2009

Quelques mots



Me remontent à la tête quelques mots que j’avais écrits lorsque j’avais écrit quelques mots et que j’avais dix-sept ans : j’avais écrit ces quelques mots qui désignaient quelques autres mots, et ces autres mots dont je vous parle, avaient beaucoup plus de sens que ces quelques mots que j’écris lorsque je tente de me remémorer les quelques mots que j’avais écrits ce jour-là. Le jour de mes dix-sept ans. J’écrivais quelques mots, sur une simple feuille, quand Najia est arrivée derrière mon épaule pour lire ces quelques mots qui parlaient d’elle. Ces mots la décrivaient en quelques mots, trois ou quatre, pas plus, la laissant paraître beaucoup plus belle que tous les quelques mots du monde. À vrai dire, elle était beaucoup plus jolie que les quelques mots que j’avais écrits. C’est pourquoi j’avais effacé sur-le-champ les quelques mots écrits, pour en écrire d’autres. Un groupe de mots bien différents qui semblaient décrire mieux les quelques mots nécessaires pour décrire la beauté de Najia. Trois ou quatre mots, pas plus. Et j’avais effacé encore ces quelques mots, peu satisfait du résultat de mes mots, pour en récrire d’autres dont je n’étais pas plus satisfait. Finalement, j’ai gardé une page blanche. 

Najia s’est penchée sur moi pour me dire quelques mots. Et ces quelques mots, je serais incapable de les transcrire, car ils me paraissent plus beaux que tous les quelques mots que je pourrais écrire. Ils ont été quelques mots chuchotés, secrètement, depuis sa bouche jusqu’à mon front. Au moment où elle a dit ces quelques mots, j’ai tenté de les écrire. J’ai écrit quelques mots qui ce sont perdus sur la page. Elle m’a embrassé. Et moi, j’ai chiffonné la page sur laquelle j’étais en train d’écrire quelques mots. L’amour d’une vie. Peut-être. De toute façon, ces quelques mots demeureront toujours introuvables, car la page qui contenait ces mots, nous avons fait l’amour dessus.


L'Homme Révolté

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