13 octobre 2009

Les adieux de William Drouin





Je sais, je n'ai pas l'habitude d'écrire sur mon propre blog. Mon lieu est devenu celui de nouveaux auteurs très prolifiques qui savent écrire le savant, le drôle et le drame. Moi, je ne sais ni écrire l'un, ni le deux ni le trois. Je n'enchaîne que futilités sur pacotilles, vous le savez bien. Mais mon temps est terminé. Je vous quitte. Je tenais tout de même à expliquer mon choix. Si j'ai refilé l'accès au blog à différents auteurs, c'est que je n'ai plus le temps de m'en occuper. Je n'ai plus le temps de soumettre de textes. Et cela me rend extrêmement coupable... J'aimais bien, moi, prouver chaque soir que j'avais écrit quelque chose. Prouver que j'étais quelqu'un. Prouver que j'avais avancer. Mais maintenant, ce n'est plus possible. J'ai refilé la responsabilité à d'autres, et cela pour libérer mon esprit trop lourd. Je devrai dorénavant expliquer à moi-même que j'existe. Ou que j'existais, enfin, tout cela dépend du moment réel de ma mort...

Ce n'est pas tant que je désire vous donner moins de ma substance, je connais bien la fixation et la succion par lesquelles vous entourez chacun de mes mots. Je suis peut-être devenu trop fou pour écrire ici. Qui sait. Trop solitaire pour finir tant de textes, à tout le moins. Il fallait que je fasse de moi l'homme sérieux que je souhaite être. Un homme droit, solide, mémorable, qui pense ce qu'il fait, et qui dit ce qu'il solidifie. Aussi solide qu'un cadavre droit à l'intérieur d'un cercueil. Si la logique le veut ; un homme innombrable, successeur des autres et surtout, clavecin au yeux des autres, et cela, indépendamment de ceux qui sont considérés comme étant « oreilles ». Je tente, en réalité, de me dissocier le plus possible des instruments de musique, car à force de faire parler les sons, je me suis retrouvé à ne réagir que par son : oh! ah! ; et cela, que l'on appelle onomatopée, est bien étrange et bien anormal pour un être humain. Pour les animaux, bon ça va, mais moi, compte tenu des poils que je compte sur les parties les plus poilues de mon corps aussi imberbe qu'une tapette à mouches...

Cela dit, je vous quitte en espérant que les autres auteurs continuent de suivre leur courant. Pour la simple et bonne raison que j'ai mieux à faire. Aussi bien mourir, que je me suis dit. Et bon, vous aussi avez toujours eu mieux à faire que de venir me lire de toute façon. Faudrait l'avouer, une fois pour toutes, que vous ne veniez que lorsque vous aviez du temps à perdre. Et même lorsque vous aviez du temps à perdre, vous le perdiez ailleurs. En fait, vous perdiez ici le temps que vous n'aviez pas réussi à perdre ailleurs. C'est fort, quand même.

J'ai lu récemment une rubrique, dans le journal je crois, d'une auteure dont le nom m'échappe, mais bon, elle parlait d'un sujet super intéressant dont le titre m'échappe mais peu importe, elle menait le sujet de main de maître, ne laissant tomber aucun adverbe, et les adjectifs se succédaient de façon merveilleuse. Vraiment, je vous le dis, ça m'a impressionné. Elle discutait en fait de son rapport à... de son rapport au... bref, je ne me souviens plus très bien, mais elle discutait de son rapport à quelque chose et tout cela coulait, avec une intro, une conclusion, c'était pratiquement parfait. Un vrai petit chef-d'oeuvre. Et je me suis dit, voilà quelqu'un qui discute de son rapport à tel ou tel truc! C'est ce que je me suis dit. Et c'est tout ce qu'il y avait à dire. Voilà. Et mon opinion au sujet de la lecture a complètement changé : vraiment, est-ce possible de vouloir lire tel truc qui porte sur tel truc que nous vivons lorsque nous sommes dans tel truc? Mais je tiens à dire qu'il est tout de même merveilleux, aujourd'hui, de pouvoir discuter de tel ou tel truc, dans une société qui, possiblement, vit tel ou tel truc...

J'ai discuté, moi aussi, pendant deux ans, sur ce blog. J'ai même, parfois, espéré devenir écrivain. Il faut être fou, tout de même. Je ne le ferai plus. Pourquoi? Probablement parce que je préfère faire cuire des moules pour ma petite amie. Ça peut paraître bête ou drôle, mais c'est, pourtant, réellement, mon occupation préférée. Ne connaissez-vous pas l'étrange bonheur qui consiste à apporter à votre être aimé une assiette pleine de moules? C'est une expérience que vous devriez vivre. Si vous écrivez vous-mêmes, je vous souhaite de lâcher l'écriture quelques courts instants (même si c'est vrai, je vous ai moi-même poussé à écrire) pour faire bouillir une casserole de moules à la tomate ou au vin blanc. Vous verrez la différence que cela apporte à votre petit cerveau à peine plus grand que le mien.

Je ne veux pas dire que je deviendrai cuisinier. Loin de là. Ce n'est qu'une autre passion. Tout comme mon addiction aux talk-shows ou aux téléséries américaines. Un poison extrêmement vivant et plaisant. Une drogue, oui, pourquoi pas. Le regard satisfait de ma copine devant ma cuisine demeure pour moi une drogue. Et c'est pour ce regard que j'aurais aimé vivre. Mais je ne suis pas cuisinier. Et son regard en est souvent un de dégoût. Presque toujours, elle recrache ce que je lui offre pour dîner. À vrai dire, je ne peux endurer le visage de dégoût qu'a ma petite amie lorsqu'elle goûte à mes moules. J'aimerais tant que ses yeux me pointent comme de grandes épées trop grandes et qu'ils me transpercent enfin jusqu'à l'envie de vivre que je tiens au plus profond de moi-même, et que ses petites mains de fées tournent l'épée en vrille au fond de mon coeur, pour faire sortir de là une fantaisie absolue, un amour ultime, un désir passant du sexe enivrant à la sécheresse la plus intense ; une sécheresse qui me laisserait les lèvres complètement dépourvues de tout mouvement, comme soudées, cousues par une ride ou une cicatrice en forme de X qui symboliserait le « ça y est, merde c'est plus que la gloire, c'est plus que l'amour, c'est l'envie de vivre ».

Je ne reviendrai plus en arrière. Alors, ne demandez-vous pas ce que je fais à ne pas écrire. Ne dites pas que je ne suis pas productif. Je n'écrirai plus rien sur ce blog. Je vous quitte. Je pars vers le Grandiose. Et ça n'a rien à voir avec mes moules à la tomate. J'ai mieux à faire ailleurs. J'ai suffisamment d'idées pour vivre. J'ai accumulé assez d'idées pour vivre, et pour mourir. Et, avant que vous ne me posiez la question : non, t'as rien compris merde je me suicide pas t'es con, j'écris un roman...

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