8 octobre 2009

Le travail toujours


Tu travailles toute la journée et c’est dur, tu t’efforces de répondre à tel appel, tu t’efforces de répondre à tel message. Et tu utilises ta mâchoire pour discuter avec ces gens, et parfois même, tu te disputes avec eux. Tu leur dis d’attendre, que le chèque n’est pas prêt. Et le client est en furie, il t’assaille de sacres, à grands coups d’osties, de tabarnacs et bon, tu raccroches fermement, et c’est là que ton muscle travaille le plus. Au niveau de ton bicep. Tu penses à toutes les fois où tu as soulevé le combiné : ça doit équivaloir à au moins 39 440 coups d’altère. Et tu observes tes muscles qui ne bougent pas. Ils te regardent et semblent te dire : on est au régime, on veut pas grossir. Tes muscles sont maigres et tes os sont toujours aussi frêles qu’avant. Et pourtant, tu travailles fort sur le téléphone. Tu le soulèves tous les jours, tu réponds à plus de 60 clients. Aïe aïe aïe, ça fait mal en dedans. 

Et quand tu reviens à la maison, tu dis que ce téléphone est l’instrument du mal. Tu en a marres de répondre au téléphone. Et tu parles de tes muscles : « Je crois que celui-là est déchiré. Vraiment. Le ligament c’est foutu. Je devrais être sur la... Pourquoi la CSST ne vient jamais au bureau? C’est absurde. »

La première chose dont tu te rends compte, en arrivant chez toi, c’est que le plancher a besoin d’être lavé. Alors tu prends la vadrouille, sans trop y penser. Et tu frottes, en effectuant le mouvement de celle qui frotte, par en avant, par en arrière. Et sur les croûtes plus sèches tu forces davantage : arrière-avant-arrière-avant-arrière-avant! Une fois le plancher impec, tu te demandes « Mais pourquoi moi je fais ça? ».

Et tu te souviens soudainement que tu possèdes un outil indispensable capable de passer l’aspirateur, de passer la vadrouille, d’épousseter les étagères, un outil indispensable qui est ton mari. Tu n’avais jamais songé à donner toutes ces tâches à ton mari. Mais maintenant, ça y est : tu aimerais que ton mari effectue toutes les tâches de la maison, parce que tu en as beaucoup à faire au travail.

Mais le mari te dit : Chaque jour, je me lève à 5h15 alors que tu te lèves à 7h, je prends mon café alors que tu n’en prends pas, je pars travaillé et je soulève 1 456 livres à transporter cette poutre d’acier qui m’a été livrée d’un type que j’ai dirigé, je la transporte et je la coupe, à la torche, je divise l’acier puis je perce des trous dans cet acier, puis je place, à bout de bras, la poutre à sa place pour la souder à sa place. Et parce qu’il y aura de la brique dessus, je soude une plaque d’acier de dix pieds, et je la soude sur des échafauds à peine solide. Et après tout ça, tu viens me dire que je devrais t’aider à faire le ménage?!

Je suppose : « Notre maison sera sale pendant un certain temps, faudra vivre avec, mais après... »

Tu es drôle, tu répètes toujours : « Toi, tu travailles, et moi je passerai l’aspirateur ce soir. Ça fait rien. »

Je crois qu’une fois au paradis, tu seras plus haute que moi. Et moi, plus bas, je ne pourrai jamais aller plus haut. Pour te rejoindre, je cherche déjà à faire mieux :

« J’ai renversé du couscous mais je peux le manger, même si c’est par terre, ça dérange rien! Je nettoie, je t’assure... Je t’aime.. »


L'Homme Révolté

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