8 juin 2011

Les sabots

Les cheveux cernes comme blonds mais devant le miroir je dirais, mes cheveux sales comme la laine des moutons sales dans l’herbe. Je n’ai jamais vu les moutons mais je sais, que ça existe, le vert sous les animaux. Que j’existe, moi, laide, pâle, sale, et la foule qui parle, que je ne sais pas parler, écrire, et cetera. Ça n’empêche que, sur un brin d’herbe, à imaginer que nous sommes tous petits fourmis, il n’y aurait plus le langage et je pense que ça serait moi la première à dire qu’ils existent les moutons et ces choses-là plus grandes que soi. 

Je serais la fourmi qui a les yeux plus grands que la terre. Des animaux passeraient dans mes yeux. Ça pourrait être un mouton, une brebis, une poule. Je les verrais sans vous, écarquillée plus grande que vos jambes. Je verrais sans réfléchir, sans miroir, et mes réflexions plus claires que l’eau que les poissons troublent je pré-sentirais les possibilités, de voir les troupeaux battre sur ma peau pâle, blanche, comme celle de mon père blanc comme neige; comme celle de ma mère blanche comme drap. 

Je n’ai jamais vu mes parents mais j’imagine, qu’ils ont préféré mourir que de prendre la laide chose qui est sortie du ventre de maman. Le docteur témoin. Le corbillard. Le drapeau qui flotte au-dessus du corbillard et les hors-d’oeuvre du buffet aux funérailles qui attendent. Le prêtre. Les ballons gonflés exprès, la pinata, et mes parents pourrissent dans ce temps-là que je frappe la pinata. Mes parents pourrissent dans la terre.

J’ai vu, sur leurs corps enterrés, des troupeaux de boeufs piétiner l’herbe et me piétiner moi. Ma tête s’est écrasée sous un sabot, plaquée contre sol, et je suis devenue inerte pendant que je ne me suis pas rendu compte. Le prêtre a fait l’amour avec ma bouche. 

C’est depuis ce temps-là que j’ai un bébé dans mon ventre. Et le bébé est blanc, lui aussi, et laid aussi. Sa mère est laide. C’est moi. Sa mère ne sera pas bonne à parler, pas bonne à écrire, et c’est la vérité. Il naîtra déçu que ce n’est pas la perfection de vivre, qu’il y aura toujours des bêtes pour lui piétiner dessus et qu’il faudra surveiller, toujours. Les crisses de sabots.

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