21 août 2011

Maladie sémiotique no.2

- Je pense que vous accordez trop d’importance aux morts.

- Vous trouvez vraiment que oui, mais pourtant, quand Mistère est mort, enterré, c’est moi dans du sable qui l’ai tout ça, et puis un peu de terre, un peu de râteau, je n’ai pas fait trop de cérémonies et le lendemain matin, je suis retourné travailler comme si le rien n’était.

- Aux mots. Vous accordez trop d’importance aux mots. C’est un lapsus de ma part. N’essayez pas d’en tirer du sens. Ce n’est que ça.

- N’empêche, que c’est tout à fait comme si nous étions à la pêche aux mots, vous en dites un et je mords, comme si le mot mort me rendait mort et me faisait voir moi mort et enterré, vous ne trouvez pas ça grave? Moi à la place de mon chat alors que pourtant je n’ai jamais goûté à ses croquettes, je veux dire, jamais je n’ai tiré la langue à quatre pattes devant un bol à chat c’est ridicule.

- Vous devriez penser au mot vie.

- Ça bloque quand j’y pense, comme inaccessible parce que, non, mon chat mort n’est pas un autre mot qui pourra remplacé celui-là. Mistère est mort que je me répète sa mort comme ça des heures devant son bol, à quatre pattes et langue sortie, je fais comme lui faisait du temps que ses croquettes étaient encore solide. Maintenant c’est comme l’humidité a pris dedans, ses croquettes molles, la grosse humidité sale de mes planchers que je panique à l’idée d’inviter d’autres animaux à se baigner dans l’espace mort que je garde un peu visqueux à la mémoire de.

- Croquette.

- Non il s’appelait Mistère. Les croquettes il mangeait, dures autrefois, ridicules de croire qu’il s’appelait Croquette alors qu’il n’avait pas l’habitude de se manger lui-même, je veux dire, comme les chiens avec leur queue.

- Vous pourriez remplacer votre Mistère par un chien.

- Ça dépend de ce que vous me dites. J’avale vos mots. Si vous me dites chien, je vais penser chien, et poisson poisson, vous me dites quoi?

- Poison.

- Ce n’est pas bête, quand on pense à tous les serpents qu’il y a, et le poison dont ils sont plein, ça me ferait un animal facile à traîner avec une laisse et à nourrir d’oeufs de souris et de souris vivantes, et de souris mortes, tout ça à la fois. C’est peut-être la solution, le poison pur et simple, ça je saurais en manger, dans peu importe le bol. Rien qu’à tirer la langue et avaler ce que vous dites. Le poison et voir si une fois mort je ne trouverais pas d’autres mots auxquels m’accrocher, éternité, miel abeille, ces choses-là dont vous ne parlez pas mais qui peut-être me feraient rêver plus loin.

- Poisson. Ma langue a fourchu.

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