7 juillet 2011

L'été honnêteté



J’avais à dire, avant de me coucher, que les champs sont, je trouve, moins denses l’été que l’hiver, mais plus fleuris, on en conviendra, que la neige fondue a aminci pas mal de terre et que tout devient alors plus visible, les brins d’herbe comme les insectes, à deux ou à six pattes, ceux qui tissent des pièges comme s’ils avaient huit pattes, les fourmis comme les hommes je veux dire, que la vie l’été avoue sa véritable épaisseur, elle perd son hypocrisie et nous y voyons les gros comme les maigres, sans manteau, sans cachette, et dès que l’un se dit maigre vis-à-vis de l’autre, l’autre se dit gros vis-à-vis de l’un, et les corps se mêlent comme ça dans une masse de chair nue sur les champs de fleurs qui, on en conviendra, sont plus chauds que si la neige avait été de la partie, car celle-là est l’ennemie blanche sous laquelle on cache des cadavres, des têtes de papa, de maman, si bien que même les meilleurs tueurs se font piéger par cette neige qui d’apparence dissimule tout mais qui, au printemps, dévoile tous les crimes, toutes les têtes que nous avons enneigées durant l’année, puantes d’avoir été abandonnées sans un dernier baiser, sans avoir été bordées, non vraiment, l’été est la saison de l’honnêteté, c’est la saison des feux qui, on en conviendra, plus ils sont gros plus ils sont beaux, tout comme les oncles autour de tel ou tel feu qui demandent à leurs petites nièces d’ajouter des bûches au cas où bientôt ils y jetteraient le corps d’un ennemi, d’un chien ou d’un chat parce que de toute façon, la tête d’un homme, comme la tête d’un insecte, une fois brûlée, ce n’est guère plus vulgaire qu’une guimauve qu’on aurait laissée à traîner à côté de tout ce que dans un été nous avons oublié de manger, y compris les petites nièces, parce que maintenant il est trop tard, il faut aller dormir, comme on aime se l’entendre dire mais déteste se le voir faire, c’est l’heure d’aller se coucher.


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