30 août 2007

Lèvres perdues

Tête de poisson cru que j’ai devant les yeux et mes yeux voient mal les couleurs des spectres qui me hantent si tu savais comme le mal s’acharne et ne vit que pour mes erreurs de conditions d’artiste mauvais quand je regarde les œuvres qui m’ont fait saigner; tête de poisson cru devant quelques tournesols jaunes avec les tiges foncées que je ne comprendrai jamais pourquoi les mères s’entêtent à rester sales bien qu’on s’efforce de sang à leur rendre le plaisir qu’elles ont perdu mais voilà, alcool que le verre me manque encore chaque fois que les astres s’effondrent, tête de poisson cru avec les paupières qui tombent à la manière des paresseux que je ne suis pas mais, si seulement quelques cervelles me laissaient dormir, vents d’odeur des Alpes que j’ai connues à tes côtés ma chérie blossom, fleur de cerise que mon cœur se tord d’ennui de vie qui n’est pas la mienne; tête de poisson cru bête indifférent à regarder les hommes tandis que les forêts émerveillent et que les chiens font des faces mignonnes en cachette, mais les hommes n’en ont que pour les tranches de bacon que les chiens s’en câlissent de ces tranches-là mais voilà, un petit morceau par ci, un petit morceau par là les chiens sont comme les mères, toujours souffrants jusqu’au jour enfin où on leur en veut d’avoir pissé sur le tapis; tête de poisson cru qui me vide l’idée de toile peinturée que mes pinceaux s’en moquent de mes malheurs et si ma psychologie se révoltait contre moi, perversité que j’ignore quel fou je serais, Munch de mon cœur, dis-moi que les planètes ne sont pas moins folles que nous pauvres suicidés et que les bombardements sont aussi naturels que les cataclysmes de vagues s’il faut que la mort dégoutte partout de sur nos têtes, la mienne se fera penchée vers l’arrière et la bouche grande ouverte, j’ouvrirai ce qu’il me reste de lèvres que tu n’as jamais touchées, j’ouvrirai ce que j’ai de rouge et qu’il me manque le féminin de ton gloss brillant pour que la mort soit rose et que les autres ne soient que les nuages dont tu te moques dans le ciel, grand astre que je t’aime, croissant de ma douceur, fais donc en sorte que les plafonds descendent plus bas encore et qu’éclatent enfin les transparences de mon aquarium, lourdeur que j’ai le ciel dans la gorge chaque fois que je sors sans toi vers les distances effrayantes sans toi, le près et le loin se confondent sur l’horizon d’où je cris de me laisser tranquille et « laisse-moi tranquille, chien de ma poche, quand tu joues dans les poubelles avec ton museau noir, ce sont mes sentiments que tu touches! »; tête de poisson cru à laquelle je m’accroche les poings serrés pour ce que je n’ai jamais eu de fort sinon mon incroyable nostalgie légendaire que même les vieux livres poussiéreux envient du fond de leurs vieux auteurs morts secs que j’ai voulu être mais les mères pleurent et les pères ne disent rien alors, les enfants pleurent sans rien dire; tête de poisson cru que l’eau me manque autant que toi, vent quétaine qui fait du bien quand le sérieux tape son apogée suprême de formules graphiques et de robots technologiques du style de je m’en vais mourir mais le métal est beau sous ses reflets argentés de futuriste si l’histoire me manque, je n’ai qu’à fouiller mieux aux précipices de toi comme tu contiens toutes les histoires et la nôtre qui pourrait s’achever aujourd’hui par le dernier mot de la dernière page plate qui fait jamais pleurer si les filles se tiennent et si les hommes les prennent, peut-être iras-tu les suivre de danses et de synchro mais, une dernière chose que j’ai à dire et c’est que si tu me quittes, orphelin que je serai dans les draps vides blancs tachés de sang si tu me laisses, ma mère a déjà fait une fausse couche une fois et il se pourrait bien que je sois cette fausse couche et que je t’écrive d’outre-tombe comme l’épitaphe interminable de ceux qui s’accomplissent au génial de leurs formidables mais moi, je ne ferai rien de ma peau si le ciel ne descend pas plus bas alors, couche-toi sur moi et n’aie pas peur du poids qui m’écrase de soulagement et n’aie pas peur de tes odeurs d’humaine vraie dans les forêts de Trois-Rivières coupées comme les putains qu’on n’a jamais payées belles, tête de poisson cru sur les rochers du fleuve, géographie que j’ai horreur de tes mouvements faciles de petite fille, je te tremblerai de terre et de volcans si tu restes avec moi, je pleurerai de bleu sur tes lèvres pour que me revienne le mauve de tes dents et que les âmes sœurs me mordent comme avant!

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