16 février 2007

Réflexion sur l'écriture no. 9843

Je suis pas du genre à crier mes sentiments sur tous les toits. Quatre-vingt pourcents du monde entre seize et vingt-cinq ans passent leur temps à se convaincre qu’ils savent aimer et à le crier : hourra, ils forment des couples – hourra, ils se tiennent par la main – hourra, comme des amoureux.

Y a les célibataires : « bon bon bon, j’ai toujours pas de blonde alors je vais sortir de chez moi, peut-être je vais en trouver une et aussi, je vais porter des jeans pas trop serrées ». Et y a ceux qui détestent les célibataires : « bon bon bon, moi j’ai mon chum et toutes les activités qu’on organisera vous avez pas idée sauf, tout ce qui compte à présent c’est qu’il reste avec moi jusqu’à ma mort quand je vais crever, on sera romantiques comme dans Moulin Rouge le film et je veux des roses rouges ou blanches ou en tout cas en autant qu’il m’aimera encore demain ».

Ça crie fort l’amour sur les toits. Ça crie qu’on s’aime et qu’on s’est trouvés, sans se regarder dans les pupilles. Des fois ils se regardent, ceux qui sont ensemble, ils se regardent dans les yeux, mais pas dans les pupilles. C’est pour faire beau. Pour que leurs cœurs fassent poum poum, parce que demain, y a l’école et à l’école le cœur arrête de faire du bruit.

Mais la fin de semaine, ils continuent leur promenade. Ils contemplent pas ce qu’ils voient. Ils se contemplent eux-mêmes et c’est tout. Ils sortent de leurs têtes, volent super haut jusqu’aux toits, tout ça pour se dire mon dieu. Mon dieu quoi? Pas le temps de se répondre, y sont trop occupés à se tenir la main super fort crrsshhh les veines qui sortent de partout et hey, souris chéri! Pourquoi tu souris pas?

Les amourettes sont à la mode. Les promenades aussi. Les amourettes se transforment comme de l’amour et les filles de moins de dix-huit ans se trouvent chanceuses de sortir dans les bars avec cet amour-là. Elles veulent pas le perdre. Elles pleurent quand les gars les laissent toutes seules le samedi soir.

Les gars spotent d’autres filles et se mettent à réfléchir sur leur enfance quatre-vingt-dix-neuf virgule neuf neuf neuf pourcents du temps, comme des enfants. Ils haïssent pas ça les gros seins, finalement.

Je suis plutôt du genre à croire que les sentiments sont une chose trop délicate pour qu'elle soit criée sur tous les toits. Il faut savoir se taire. Les sentiments, il faut savoir les diriger aux bons endroits. Ce sont eux qui soutiennent les mots d’un texte. Sans ça, tout s’écroule.

Faut pas les gaspiller. Les sentiments sont rares. Il faut en prendre soin. Les gens prennent jamais soin des sentiments, comme ils prennent jamais soin de l’amour.

J’étais assis là, en train d’essayer d’écrire quelque chose de nouveau, mais rien me venait. C’est que j’avais fait un cauchemar sans aucun rapport avec la réalité (du genre que freud pourrait rien dire), et ces cauchemars-là sont les pires, tellement qu’ils m’enlèvent le goût d’écrire. Dans ce mauvais rêve j’étais ivre et le monde riait de moi parce que j’étais ivre. Faut pas chercher. Des fois y a pas de réponse.

J’étais assis là, et comme la chose refusait de m’apparaître sur la page blanche, je suis sorti de l’appartement avec, admettons, un manteau. Et un foulard, oui c’est vrai. Et mes mitaines jaunes aussi, c’est vrai (coudonc j’avais le suit au grand complet). On aurait pu croire que j’étais parti glisser dans les pentes avec mes salopettes d’hiver.

J’ai marché trois quarts d’heure sans jamais glisser sur rien. J’avais pas plus le goût d’écrire. J’étais rendu au parc de la rue derrière chez nous, comment elle s’appelle, la rue… Rachel saurait vous le dire, ah oui, Mont-Royal, mais c’est le parc du nom d’un nom qui m’échappe mais bref : c’est là que j’ai vu, bon vous allez pas me croire, que j’ai vu une apparition. Un animal sur le trottoir, près du parc. Au début, j’ai cru à un corbeau.

C’était un oiseau, ça c’est sûr, mais comme c’était la nuit, genre 3h29, je voyais pas grand-chose. Ça avait plus l’air d’une ombre avec des ailes.

Je me suis approché de l’espèce de bête étrange qui tapait son bec dans la neige. Mais c’était énorme o.k., j’avais été assez cave pour penser que c’était un corbeau, mais les corbeaux sont pas aussi gros que ça! L’oiseau dont je vous parle faisait au moins cinq mètres de long! Sur le trottoir, y avait beaucoup de neige mais y était là. C’est quand il s’est envolé pour se percher sur la clôture du parc que j’ai vu toute sa grosseur.

Y était même pas noir, je pense même que y avait même pas de plumes! Y était gris, avec un long bec. Là je voulais pas qu’y se sauve tsé, fait que j’ai arrêté de bouger pis j’ai réfléchi super vite : je devrais-tu aller chercher un kodak pour vous le montrer en photo?, je devrais-tu essayer de l’attraper?, etc., des questions.

Finalement, je vous le décris o.k. long bec comme les oiseaux comment qu’on appelle ça… des pélicans? Presque pas de plumes, de petits yeux assez gentils, de longues pattes molles, pis des petits genres de pics sur la tête. Y avait pas l’air en super bonne santé, un oiseau gros de même sur un trottoir ça avait comme pas rapport de toute façon. Je me suis dit faut je fasse quelque chose.

J’ai réussi à le toucher. Je vous jure y était aussi gros qu’un cheval! Y me donnait un coup d’aile pis je mourais drette là! J’avais attendu que quelqu’un passe pour savoir si j’hallucinais ou pas, mais personne. Je capotais, parce que moi quand j’étais petit, j’aimais beaucoup les dinosaures. Je connais pas mal leurs noms. Pis ça, ce que j’avais à côté de moi, ben c’était un Ptérodactyle!

Bon, c’est mon hypothèse, parce qu’il correspond parfaitement à mes cartes d’identifications de dinosaures. Là je me rappelais pu trop si les Ptérodactyles étaient carnivores ou herbivores, j’avais un peu peur, mais j’ai même pas eu le temps de m’enfuir, le gros oiseau immense s’est mis à battre des ailes. Y est monté dans les airs pis y m’a pogné carrément, j’ai rien pu faire.

Y me tenait les deux bras dans ses pattes pas si molles que ça finalement. Ses ailes battaient tellement fort que j’entendais juste ça! Non, sérieusement, c’est fort un Ptéro! Ça fait que là je savais pas pantoute où c’est qu’y m’emmenait. Je commençais à voir la ville de plus en plus petite pis une chance que je m’étais habillé chaudement parce que moi et le Ptéro on est montés à au moins 50 mètres du sol, pis c’était venteux!

Disons que là j’avais de quoi écrire un méchant roman. Ça a commencé à m’inquiéter quand on est passé au-dessus de mon appartement. On était environ 20 mètres plus haut que le toit de mon apparte, pis je grouillais pas mal pour qu’y me lâche. C’est ça qui a faite. Y m’a lâcher.

Me su péter la yeule solide, sur le toit de mon apparte, j’vous jure que ouch, ça a pris l’ambulance pis toute! Rachel a dit que j’avais failli crever… Tk jla crois pcq ouf, jai des mechantes bosses sur cte tete la.

La jvous parle pcq men suis remi mais jai encor la face décapiter man, les cicatrice une jambe dans le platre pis toute, ish que chus pas chanceu en tk javais tjrs rêver dvoir un ptéro en vrai ben cé faite.

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