21 décembre 2007

L'Histoire du Poisson



Il était une fois un Poisson.

Il était, cette fois, un Poisson qui vivait dans une mer; mer qu’on disait bleue, mais transparente comme le verre.

Il n’y avait, cette fois-là, dans cette mer bleue qu’une seule pierre. Aucune autre. Et sous cette pierre était le seul endroit où pouvaient se cacher tous les poissons de la mer.

Il était une fois, cette fois où l’on vit ce Poisson poursuivi par de grands Requins blancs, ce Poisson qui se cacha sous la pierre pour échapper aux dents des Requins.

Il était donc une fois, cette fois qui n’en était rien qu’une, un Poisson qui profita de sa solitude pour implorer Dieu : « Je suis au fond de la mer, caché sous la pierre, dit le Poisson. Me voyez-vous? Puisque je suis si bas, au plus creux des eaux, et vous si haut dans les cieux, je doute que vous m’aperceviez. Mais je vous appelle, car je garde espoir que vous m’entendiez. »

Dieu ne répondit pas. Pas cette fois.

Dieu était partout, cela était vrai : il était parfois ici, parfois là-bas. Mais parfois aussi, il était ailleurs. Ainsi, celui qui souhaitait voir Dieu apparaître devant ses yeux devait user de patience.

Seul les êtres les plus patients verraient, une bonne fois, leurs conditions changer par l’apparition de Dieu. Or, seul un Poisson fut capable d’attendre que la bonne fois se présentât.

***

Sous la pierre, dans la mer bleue, le Poisson implora Dieu pour une deuxième fois : « Je vous appelle encore, dit le Poisson. Et parce que je vous adore, je vous attends. »

Dieu ne répondit pas. Pas cette fois.

Dieu tardait à apparaître. Mais le désespoir n’existait pas chez le Poisson.

***

Enfin, il était cette fois où la fois fut la bonne. Cette fois où enfin on vit une exception. Un miracle se produisit pour celui qui avait su attendre.

Le Poisson implora Dieu une troisième fois. Il pria : « Dieu, j’ai faim... Toute ma famille meurt de faim... Je vous implore, car les Requins menacent de nous manger. Je dois sans cesse nager pour me sauver d’eux, mais voilà que, maintenant, mes muscles s’affaiblissent. Je vais mourir si vous ne me donnez pas quelque chose à manger… »

Le Poisson se fit entendre. Dieu lui répondit : « Tu as su attendre, Poisson. Ainsi, je te répondrai autant de fois qu’il y aura de petites ou de grosses pierres au fond de cette mer. »

Le Poisson n’en compta qu’une seule. Il saisit sa chance, puis sortit de sous la pierre.

Dieu apparût au-dessus de la mer bleue. Comme il n’y avait qu’une seule pierre dans la mer, il ne dit qu’une seule chose : « Avant mon apparition, il y avait la faim et la faiblesse. Dorénavant, il y aura de la nourriture pour toute ta famille. Toutefois, tu devras nager pour chercher la nourriture que je placerai au hasard, pour toi, dans la mer. »

Et le Poisson vit les doigts de Dieu disperser toute nourriture sur les vagues de la mer bleue. La nourriture coula jusqu’au fond et se déposa, un peu partout, dans le sable et les algues. Le Poisson n’eut donc qu’à ramasser, chaque jour, la nourriture dont il avait besoin.

***

Tous les hommes de la terre vivaient en ce temps-là au bord de cette même mer bleue. Ils virent ce que Dieu avait donné au Poisson, et considérèrent ce don comme une injustice. Jaloux, ils prièrent eux aussi : « Dieu, dirent les hommes, c’est une injustice que de donner à ce Poisson ce qu’il demande, car nous aussi avons faim! »

Mais Dieu ne fit rien pour l’Homme. Pas cette fois.

Les hommes se sentirent délaissés. Frustrés, ils cessèrent de prier Dieu.

Bien sûr, ils trouvèrent suffisamment de nourriture pour survivre, mais ils furent obligés de se piller les uns les autres. Cela provoqua une grande guerre qu’on mena au nom de Dieu.

Beaucoup s’entretuèrent, jusqu’à ce qu’un homme vint enfin, un peu plus tard, près de la mer bleue. On appela cet homme César. Il ne fit qu’une brève apparition : pour se venger de ce Poisson qui avait demandé l’aide de Dieu, il lança à la mer une pierre grosse comme la main d’un homme. Il espéra que la pierre blessât le Poisson. Puis, ce fut le calme.

La pierre qu’il avait lancée frappa la surface de l’eau et coula pour rejoindre la pierre sous laquelle le Poisson avait l’habitude de se cacher des Requins blancs. Le Poisson ne fut pas blessé.

Dans toute la mer bleue, on put alors compter deux pierres.

***

Le Poisson avait accepté de toujours nager pour ne pas mourir de faim. Chaque jour, il trouvait un peu de cette nourriture que Dieu avait déposée dans le sable et les algues. Bientôt, il parvint aisément à nourrir toute sa famille et à faire des provisions en vue des temps plus froids.

La famille du Poisson demeurait le plus souvent à l’abri, cachée sous la pierre. La mère du Poisson s’occupait à entasser les surplus de nourriture, tandis que le père guettait les réserves afin qu’aucun Requin ne volât ce qu’on tentait d’accumuler.

Un jour, on remarqua qu’une deuxième pierre s’était ajoutée à la mer, appuyée contre celle qui s’y trouvait déjà. Trois poissons moururent sous le poids de cette pierre, mais du reste, c’était une bonne chose, car une nouvelle pierre rendait plus grande la cachette du Poisson et de sa famille.

Du coup, plusieurs petits vinrent au monde sous ces deux pierres.

Des jours passèrent. Le Poisson ne cessa pas de nager pour approvisionner sa famille. Peu à peu, cette famille devint village; ce village devint pays, et en ce pays, le Poisson voulut retourner vivre avec sa famille.

Le pays fut trop grand, et trop de bouches demandèrent à être nourries.

Tous les poissons ne cherchèrent pas la nourriture de Dieu dans le sable et les algues. Tous se contentaient chaque jour de tourner en rond, dans un même lieu, espérant que Dieu déverse à cet endroit le repas du matin, du midi et du soir.

La nourriture vint à manquer au pays : « Dieu ! cria le Poisson. J’ai nagé à la recherche de nourriture, comme vous me l’aviez demandé. Seulement, j’ai aujourd’hui tout un pays à nourrir. Les familles se sont multipliées. Certaines ont tourné en rond, à la surface de la mer, et sont devenues riches en récoltant toute nourriture qui tombait de vos doigts. D’autres, faibles et pauvres, n’ont pas eu autant de chance. J’ai cru bon de donner toutes mes réserves aux plus pauvres, mais bientôt, je n’aurai plus rien. Ne puis-je donc rien faire pour tous ces riches qui tournent en rond et ces pauvres qui ne savent pas chercher? Dites-moi, Dieu : quel est donc le sens de ma quête? »

Dieu entendit encore une fois le Poisson. Il avait bien répondu à sa première demande, ainsi il ne put lui refuser la deuxième.

Il répondit au Poisson, même si cela rendait l’Homme jaloux, car deux pierres se trouvaient maintenant au fond de la mer bleue : « Si tu ne sais quel sens donner à ta quête, tu n’as qu’à bâtir une maison pour toi et ta famille au fond de la mer : cette maison sera la vôtre, et vous y serez maîtres. Il en ira de même pour toutes les familles. Il y aura dans ce pays autant de maisons qu’il y aura de familles. Ceux trop faibles pour en bâtir viendront cogner à ta porte. Tu les accueilleras. Je te promets, Poisson, que si tout ton peuple obéit à mon commandement, je viendrai porter chaque jour, devant la porte de chaque maison, la nourriture nécessaire pour vivre. Enfin, Poisson, tu seras riche, et si tu ne sais que faire dans la maison que tu auras bâtie, tu n’auras qu’à raconter à ta famille des histoires que tu inventeras : telle sera le sens de ta vie ; telle sera ta quête. »

Tous les poissons obéirent au commandement de Dieu. Ils bâtirent des maisons et accueillirent ceux trop faibles qui ne pouvaient en bâtir.

***

Près de la mer, ce jour-là, les hommes se questionnèrent aussi le sens de leur quête : « Nous ne savons ni où aller, ni qui nous sommes. Dieu, nous vous demandons de définir l’existence humaine, car nous ignorons même si nous existons! »

Mais Dieu ne fit rien pour l’Homme. Pas cette fois.

Les hommes, offusqués par l’absence de Dieu, écrivirent des histoires pour se venger du vide qu’on leur imposait. Leurs histoires finirent par expliquer les raisons de leur existence.

Vint alors un homme qu’on appela Descartes. Celui-ci lança à la mer une pierre grosse comme la tête d’un homme. Il voulut qu’elle assommât le Poisson.

Le Poisson ne fut pas assommé.

Cela fit trois pierres dans la mer bleue.

***

Au fond de la mer bleue, un tas de maisons furent construites. Celles-ci abritaient tout autant de familles. Le Poisson put vivre avec les siens sans avoir à toujours nager à la recherche de nourriture.

Un soir, il inventa une histoire qu’il raconta aussitôt à sa famille : « Il était une fois, dit le Poisson, un petit Piranha qui se croyait très rusé.

Ce Piranha, bien qu’il fût petit, avait grand estomac. Il avait toujours faim.

Rien ne rassasiait ce petit Piranha qui avait l’appétit d’un grand Poisson.

Un jour, ce petit Piranha nageait calmement dans la mer bleue lorsqu’il rencontra une Baleine bleue près d’une épave : « Madame la Baleine, dit le Piranha, vous êtes bien trop grosse! Si vous le voulez bien, je mangerai un peu de vous. Ainsi, vous maigrirez et n’aurez plus à supporter votre poids trop lourd. Vous pourrez nager sans vous épuiser. Si vous me laissiez vous manger un peu, je vous en serais très reconnaissant car j’ai toujours faim.»

La Baleine ne s’était pourtant jamais sentie grosse. Mais, afin de rendre ses déplacements plus faciles, elle accepta de se faire manger quelques morceaux. Elle rapetissa et devint aussi grosse qu’un Requin blanc. Le Piranha se trouva très rusé.

Le jour suivant, le Piranha passa encore près de l’épave. Il y rencontra un Requin blanc : « Monsieur le Requin blanc! dit le Piranha. Vous êtes bien trop gros! Laissez-moi vous dévorer un peu, ainsi vous serez plus à l’aise pour chasser les truites et les saumons! Aussi vous serez si rapide que vous dominerez toutes les espèces. »

Le Requin blanc n’avait jamais chassé de proies, mais il crut bon de le faire. Il accepta que le Piranha lui dévorât un peu le corps. Le Requin blanc devint alors aussi gros qu’un Dauphin.

Le jour suivant, le Piranha rencontra un Dauphin près de l’épave : « Monsieur le Dauphin ! dit le Requin. Vous êtes bien trop gros! Si vous me laissiez manger ce que j’ai à manger, vous seriez ensuite plus agile. Il vous serait facile de faire toutes sortes de pirouettes à la surface de l’eau. »

Le Dauphin n’avait jamais eu l’idée de faire de telles pirouettes, mais il trouva l’idée bonne. Il se fit manger quelques morceaux et devint aussi gros qu’une Truite argentée.

Le jour suivant, le Piranha vit une Truite argentée près de l’épave : « Madame la Truite argentée, dit le Piranha, vous voilà bien grosse aujourd’hui! Toute cette chair que vous avez en trop attirera les Requins blancs… Ils n’hésiteront pas à vous dévorer tout d’un coup! Je vous propose donc de ne gruger que quelques petits morceaux de vous. Ainsi, vous serez plus en sécurité. »

La Truite argentée n’avait jamais craint les Requins blancs, mais elle accepta de se faire manger la moitié du corps. Elle devint aussi grosse qu'un Piranha.

Le jour suivant, le Piranha passa près de l’épave et vit un autre Piranha. Il le salua : « Bonjour, Monsieur le Piranha! Il ne me semble pas vous avoir déjà vu. Qui êtes-vous? »

Le Piranha répondit à l’autre : « Vous ne me reconnaissez pas? Pourtant, moi je vous connais! Vous venez chaque jour me dévorer un peu plus!

- Vraiment? demanda l’autre. C’est impossible, je devrais vous connaître! Dites-moi votre nom! Qui êtes-vous donc?

- Ah, si vous saviez… Je suis tant de choses! J’ai été une Baleine bleue, puis un Requin blanc, puis un Dauphin, puis une Truite argentée, avant d’être aujourd’hui ce Piranha que vous voyez.

- Vous avez été tout cela! dit le Piranha avec admiration. J’aurais bien aimé être autant de choses! Mais je n’ai été qu’un pauvre petit Piranha affamé… Au fait, j’ai faim : savez-vous où je pourrais trouver d’autres Baleines bleues?

- Oh, ça non! Tous les Piranhas ont fait comme vous : ils ont tout dévoré. Il ne reste plus que de petits Piranhas comme vous et moi.

- Vraiment? Alors, dites-moi comment faire pour être tout ce que vous avez été! Je souhaite moi aussi être autre chose! Quelque chose de gros! Je veux être cette Truite argentée, ce Dauphin, ce Requin blanc! Cette Baleine Bleue! Comment faire pour grossir?

- J'aimerais bien vous venir en aide, Monsieur... J'ai une idée : dévorez-moi. D’un coup! Si vous me mangez, peut-être grossirez-vous avant demain! »

Et le petit Piranha obéit à l’autre. Il le dévora.

Ce petit Pirhana rusé avait bien réussi à tout manger. Toute espèce s'était éteinte. Il se retrouva seul dans la mer bleue.

Tout cela n'avait pas été suffisant pour le faire grossir. Le lendemain, il mourut de faim. »

Cette histoire fit frémir la famille du Poisson. C’était ainsi : tous ceux qui entendaient cette histoire une première fois voulaient la réentendre une deuxième fois tellement elle était bonne.

D’autres familles prirent connaissance de l’histoire que le Poisson avait inventée. Ils la racontèrent à leur tour, aux autres poissons de la mer, dans d’autres maisons. L’histoire voyagea dans tout le pays. Tous parlaient de ce petit Piranha affamé qui avait causé la fin de la mer bleue.

Peu à peu, tous les poissons inventèrent eux aussi des histoires, si bien que toute la mer fut peuplée de conteurs. Bientôt, plus personne ne voulut entendre l’histoire du petit Piranha.

Le Poisson leva les yeux au ciel et demanda la présence de Dieu encore une fois : « Dieu! Chaque jour est une angoisse, car je ne sais quelle nouvelle histoire inventer! Les autres poissons s’efforcent toujours de tout raconter avant moi! Je suis stressé, constamment je désespère : je ne peux plus vivre ainsi! »

Dieu apparût au-dessus des flots. Il compta trois pierres au fond de la mer. Il rassura le Poisson : « Avant, il y avait les histoires. Dorénavant, il n’y aura que le désir d’en faire de nouvelles. Tu n’auras donc qu’à raconter l’angoisse que représente l’invention de nouvelles histoires. »

***

Au rivage, c’était la marrée basse. Les hommes s’élevèrent encore contre Dieu, car il parût que celui-ci n’aidait que les autres espèces : « Dieu ! crièrent les hommes. Vous n’entendez donc que les poissons? Nos os sont rongés par la mélancolie, et nos artistes se suicident par trop d’angoisse! Nous sommes incapables d'écrire de nouvelles histoires! Vous ne ferez donc rien pour nous? »

Mais Dieu ne fit rien pour l’Homme. Pas cette fois.

Les hommes se regroupèrent alors tous autour d’un seul qu’on appela Freud. Celui-ci lança à la mer une pierre grosse comme un homme. Il tenta d’assassiner le Poisson.

La pierre atteignit, au fond de la mer, les autres pierres. Le Poisson ne fut pas assassiné.

Cela faisait quatre pierres.

***

Le Poisson racontait l’angoisse de l’invention d’histoires. Il s’épuisait à expliquer les malheurs qu’impliquait la création. Ses proches en firent autant, puis plusieurs moururent de grandes dépressions, de détresse et de mélancolie. La folie s’empara de toutes les familles. Les criminels se multiplièrent et l’on dut en enfermer plus d’un.

Cette fois, le Poisson ne demanda pas à Dieu de lui donner de réponse. Il ne l’implora que pour exprimer sa douleur : « Dieu, dit-il calmement, j’aimais bien raconter des histoires. J’aimais aussi chercher le sens de ma quête. Mais plus que tout, j’aimais nager pour échapper aux dents des Requins. Je ne veux plus raconter ni les histoires, ni l’angoisse. Car ce sont les angoisses qui font les histoires aujourd’hui, ce sont aussi les histoires qui font mon angoisse. »

Dieu ne répondit rien. Mais il entendit.

***

À ce moment-là, les hommes de la terre se révoltèrent. Ils tentèrent de définir la littérature, mais ils n’y parvinrent pas.

Ils finirent par souhaiter la mort de Dieu. Ils manifestèrent en grand nombre, car Dieu n’aidait ni homme ni femme, il était pour eux inutile de croire en Lui.

Un homme qu’on appela Einstein vit alors le jour. Il tenta de trouver une solution au problème des hommes. Il s’avança près de la mer bleue. Au lieu d’y jeter une cinquième pierre, il y sauta et revint sur la terre avec, dans un sac, les quatre pierres que les hommes avaient lancées depuis des siècles.

Tous les hommes s’isolèrent dans des tentes et crièrent entre eux : « Dieu! Disparais donc! Nous n’avons pas besoin de toi! Tu es utile en rien! »

Et cette fois fut la bonne.

Dieu leur répondit pour la première fois : « Qu’y a-t-il, Hommes? Vous auriez voulu que je vous vienne en aide de la même manière que j’ai aidé ce Poisson? »

Puis, Dieu prit la parole une deuxième fois : « Vous auriez voulu que je vous donne toute nourriture? Que je donne un sens à votre quête? Que je vous oblige à raconter des histoires? Mais je n’ai eu besoin de vous aider en rien! Vous avez tout fait cela par vous-mêmes! »

Puis, une troisième fois : « Jamais je ne suis apparu devant vous. Toutefois, vous avez eu droit au même sort que le Poisson et que toute autre espèce. Si j’étais apparu devant vous, cela n’aurait rien changé. »

Puis, une quatrième fois : « La différence entre vous, Hommes, et les autres espèces, est qu’aujourd’hui vous n’attendez plus de me voir apparaître, mais plutôt, vous souhaitez me voir disparaître! »

Puis, Dieu n’adressa plus la parole aux hommes.

***

Dieu retourna au-dessus de la mer bleue. Il n’y compta aucune pierre. Il vit aussi la détresse dans laquelle il avait plongé tous les poissons.

Il descendit alors dans la mer pour implorer le Poisson afin que ce dernier l’entende : « Poisson, dit Dieu, ceux que je n’ai pas aidés n’ont pas su se comporter mieux que ceux à qui je suis venu en aide. L’Homme a souhaité me voir disparaître avant même que je ne sois apparu devant lui. »

Le Poisson ne fit pas un geste. Mais il entendit la parole de Dieu.

Transparent, dans la mer, Dieu continua : « Je te rassure, Poisson, l’Homme s’est comporté de façon égale à Toi. Il n’a pas échappé au malheur. Mais au lieu d’agir pour moi, il a agi pour se venger de mon silence. »

Le Poisson ne parla plus, car il fallut qu’il ne parlât plus pour oublier ce qui s’était produit.

Puis, Dieu fit une promesse au Poisson, de même qu’il la fit à tous les autres poissons, abandonnant l’Homme au perpétuel enfer de son existence : « J’ai entendu ta requête, Poisson, et pour Toi, je ferai de la mer bleue un lieu paisible. Je ferai en sorte que Toi, tes proches et tes cousins ne puissent plus raconter d’histoires. »

Et ce fut ainsi.

1 commentaire:

Z. a dit...

C'est une histoire vraiment forte, mais je ne suis pas encore tout à fait certaine de l'avoir comprise dans toutes ses subtilités... Et puis, je ne crois pas que Descartes eu vraiment lancé de pierre pour tuer le poisson, lui qui portait Dieu garant du savoir humain (puisqu'impossibilité de malin génie). Quoiqu'il est vrai qu'il détestait le clergé...