29 juin 2009

Les invités




François : Pas ce soir.

Mirandole : Pourquoi pas ce soir? Quel soir alors?

François : Pas celui-ci.

Mirandole : Y aura-t-il un soir?

François : Oui.

Mirandole : Il y aura un soir où tu diras « oui ce soir »? Tu me le promets?

François : Oui.

Mirandole : Quand?

François : Un jour.

Mirandole : Non! Pas un jour! Un soir!

François : Oui, un soir. Il y aura un soir. Mais ce soir, je n’ai pas envie.

Mirandole : Tu n’as jamais envie!

François : Ils salissent toujours la table quand ils viennent!

Mirandole : Mais on ne les invite jamais! Si on les invitait ce soir, ça serait fait. Et jamais plus nous n’aurions à les inviter pour le reste de l’année! Tu serais content! Qu’en dis-tu?

François : Peut-être... Ça pourrait se faire...

Mirandole : Je les appelle!

Mirandole appelle Albert et Jano.
Aussitôt, Albert et Jano arrivent.


Albert : Mirandole! Pourquoi tu ne nous as pas invités plus tôt? Il est superbe ton appartement... et ta table! oh!

Jano : Oh! Elle est belle!

François : C’est ma table...

Mirandole : Et la mienne!

Albert : Alors dis-moi, pourquoi?

Mirandole : Parce que deux mains sales valent mieux qu’une propre!

Albert : Mais il ne faut qu’une seule main pour prendre le téléphone et faire l’invitation...

François : C’est lui qui hésitait à vous appeler...

Albert : Il avait les deux mains propres?

Jano : C’est du bois vernis?

Mirandole : Non! Ça c’est du François tout craché!

Jano : Oh... Alors elle est sale? Est-ce qu’il crache souvent?

François : Non. Elle est propre. Je la nettoie chaque matin.

Mirandole : Pas ce soir! Chaque soir, il dit pas ce soir...

François : Je ne la lave jamais le soir!

Mirandole : Mais le matin...

Jano : Le soir, il crache, c’est ça?

François : Oui, c’est important de le faire. Et je suis seul à le faire...

Albert : Je peux aider!

Albert crache sur la table.

François : Ça y est. Ça commence... Chaque fois qu’ils viennent, ils salissent ma table...

28 juin 2009

Dr. Samos (1965-2007)




Vous ne connaissez pas le Dr. Samos? cliquez ici pour voir sa bio en détails et la liste complète de ses oeuvres

SON OEUVRE

Dr. Forgei Samos (1965-2007) est un écrivain russe dont l’oeuvre est posthume. Aucune oeuvre de Samos n’a été publiée avant 2009. 

Samos compte aujourd’hui à son actif 46 romans reconnus partout à travers le monde, dont La victoire de Saint-Argost dans la contrée des elfes (le troisième d’une Trilogie médiévale avec des chevaux et des moussaillons sur des bateaux dont les rames avaient la forme de tentacules), L’expérience surnaturelle du Dr. Roux (roman dans lequel le personnage du Dr. Roux, un chirurgien aux cheveux noirs, fait apparition pour la première fois) ainsi que Je cherche ma tuque chez les Turcs. Ses romans font de Samos l’auteur russe le plus prolifique que la modernité ait connu.

Samos, c’est aussi 20 ouvrages scientifiques, dont Le mystère de Jésus : étude sur l’anatomie du Christ ; revu par le Dr. Gaspé de l’Institut de Science de Verdun sous la direction du Dr. Samos (ouvrage dans lequel il avait prouvé que Jésus était gros), Les femmes n’ont pas de vagin (ouvrage dans lequel il avait prouvé que le vagin des femmes n’était pas gros, parfois même inexistant) et Le pénis de l’homme à travers les époques, du paléolithique à aujourd’hui, étude sur la longueur du pénis masculin : existe-t-il un pénis féminin?

En plus de tout cela, l’oeuvre de Samos compte plus de 110 livres pour adolescents, dont Deli-da mange sa compote, Deli-da a un rendez-vous, Deli-da va au bal des finissants, Deli-da a une bouteille entre les jambes, Deli-da a perdu sa robe, Deli-da dans le sous-bois, Deli-da se fait agresser par Meli-do, Deli-da est enceinte, Deli-da a un enfant et le dernier de la série : Deli-da au tribunal.

L’ensemble de l’oeuvre de Samos est impressionnante. En plus des romans, des ouvrages scientifiques et des livres jeunesse, il écrit en 2003 trois recueils de poésie : dont le célèbre L’Arche vaque chez l’Archevêque et Le pédophile file

SON QUOTIDIEN

Samos dit avoir une méthode bien précise pour écrire : chaque matin, il boit un café, se réjouit de son célibat, nourrit son chien, se frotte sur les fesses de la jeune fille qui est restée à coucher, part faire des courses pour acheter de quoi lui faire une omelette, fait une omelette, regarde la télé ; le midi, il la supplie de quitter sous prétexte qu’il doit écrire, la regarde partir, regarde encore un peu la télé cette fois seul, s’habille, se déshabille, prend une douche, se rhabille, donne les restes de l’omelette à son chien, prend une bière, s’endort tout habillé ; vers 19 heures il se réveille, pisse dans le lavabo de la cuisine pour le thrill que cela lui procure, se déshabille encore, prend une autre douche, sort au bar près de chez lui, ramène une fille (mineure si possible) chez lui ; vers minuit, il ouvre une douzième bière, converse avec la petite, coupe sec la discussion qu’il entretenait avec elle, prend un crayon, écrit soixante pages, respire, arrête d’écrire, prend une dernière bière, fait l’amour en récitant ce qu’il vient d’écrire, puis s’endort jusqu’au lendemain.

Cette méthode lui permet de devenir l’auteur extrêmement reconnu et prolifique qu’il est devenu. 

À l’âge de 42 ans, Samos meurt d’une crise cardiaque. À sa mort, rien de ce qu’il a écrit n’a encore été publié. Heureusement, en collaboration avec les femmes que Samos a baisées, un groupe d’étudiants en littérature de l’Université de Moscou ont pu reconstituer l’oeuvre de l’auteur, selon ce qu’il récitait alors qu’il faisait l’amour. Grâce à elles, nous pouvons aujourd’hui jouir de l’oeuvre fabuleuse du Dr. Forgei Samos.

25 juin 2009

La pute aux roses

je dépose
une rose
dans un pot
trop gros
pour elle
et elle
déjà se meurt
à voir les heures
défiler chaque minute
et je dis les putes
c’est pareil
on leur paie du soleil
mais elles se taisent
malgré la photosynthèse
même cuba
c’est pas
assez pour elles
parce que elles
veulent du soleil
alors on les paye
mais elles
veulent goûter du miel
mais c’est du sperme
quand c’est ferme
elles s’annoncent
puis elles renoncent

toujours c’est
toujours pareil hè

Parenthèse


hey tu te souviens la petite table blanche (celle trapue, en mélamine, qu’on n’utilisait plus et sur laquelle il y avait plein de peinture parce que je repeignais notre chambre cette semaine tu te souviens, cette table sur laquelle nous faisions l’amour autrefois au temps où nous nous aimions et sur laquelle nous dessinions des fous sur toi, sur moi, et où l’on discutait de ce que nous serions plus tard ; toi la plage, moi la bibliothèque ; où l’on discutait de nos voyages le sucre entre les dents, mourant d’envie de sel et pour cela, les chips qui glissaient aux quatre coins de cette table mais s’arrêtaient avait de tomber comme au bord d’une falaise tu te rappelles, cette table devenue collante à force d’y renverser des verres comme sur une mappemonde et d’y voir dans les taches des pays, des continents et nous deux s’embrassant tu te souviens, cette table autour de laquelle toi tu disais que tu aurais voulu que je sois une tache collante t’embrassant amoureusement à chacune des secondes indélébiles et moi, je répondais que j’aurais voulu que tu ne sois pas une tache et cette semaine, j’ai repeint la chambre où nous dormions et où j’étais incapable de dormir à cause de cette foutue table qui conservait intacte la préciosité de notre couple et si je t’ai assassinée sous un pinceau, sous les perles d’un rouleau, c’est pour conserver intacte la viscosité de notre séparation et me dire à nouveau qu’aujourd’hui est nouveau) eh bien aujourd’hui, je l’ai jetée aux éboueurs.

22 juin 2009

Burp





Parfois j’ai envie de vomir je ris à la mort et ça crie haha jusqu’à des heures et je balbutine, je me balbutie moi-même avec moi-même et le mal de coeur qui se lève et me donne envie de mal decoeurer et je prie non pas que ça ne sorte pas mais que ça sorte oui alors je rote et ça va mieux

BURP.

Je déliverne autres choses d’utile à la société et je parle franchement sciemment avec science et je donne les formules desquelles découlent les formules dont je suis de da d’où mais, un écho et dès lors quelques réticences quant à la forme de ma gorge j’ai envie de vomir mais je rote et ça va encore

BURP.

Il y a cette fille que je necktenectarerais et il y a cette autre que je fourmelièfourreleralerelèmais que je me ressaisis derrière mes six pieds trois et pourtant, je pourrais l’agresser je pense, je pensais presque dès lors mais hops un instant, un instant d’envie de vomi et je rote

BURP.

Mais je suis beau et je me mets à penser que je suis vraiment beau en réalité, non seulement le réel mais aussi ma beauté, elle est vraie, je suis ici le plus beau d’entre tous et je peux vraiment véritablement me permettre de m’éventrer la beauté et ce que je veux dire par là, c’est de laisser voir le coeur d’au-travers de cette beauté que j’ai qui a un coeur et le petit

BURP.

Mais ça continue et ça roule, des filles plus idiotes que moi viennent me voir, toutes élégantes et je trouve que la place est toute voire élégante et moi qui es moins qu’élégant mais elles encore moins que 

BURP.

Deux d’entre elles s’embrassent un peu, m’excitent ou enfin le tente et me propose d’aller chez elles car elles me réserve un trip à trois d’enfer et je dis oui mais non je dis oui mais développons quelque chose toi et moi, développons quelque chose de sérieux je veux des enfants elles rient et moi je fais

BRUP. (non là à cette heure-là ce n’était plus BURP c’était BRUP)

Et je répète je veux des enfants, rien de trop abrupte, mais elle pète les plombs me reconsidère et quand une fille vous reconsidère c’est grave ; je me suis rendu chez elles (chez ces deux-là) pour dormir ou enfin pour

BURP. (il est revenu celui-là ; le temps du taxi)

Baiser, c’est ce qu’elles voulaient mais moi je ne voulais rien d’aussi fugace d’aussi fulguracemataphorique j’ai dit non ça suffit je reprends le taxi je m’en retourne chez moi hic!

HIC? BURP.

Pissou ; elle me dit tu t’en retournes chez toi pissou tu as peur du trip à trois qu’on te réserve et je répète je veux développer! je veux quelque chose de sérieux sur lequel de quoi duquel de quoi développer! L’enfant la vie l’enfant la vie je répétais l’enfant la vie et je ne parlais nullement du trip à

BURP. (oops)

Le chauffeur de taxi me ramenait chez moi et je pensais j’ai raté la connerie de l’autre, le déshabillé de l’une mais je m’en moque et je m’en suis moqué une bonne seconde avant de m’endormir dans le rembourré de la banquette arrière et

HUM. LE BOURRÉ.

Et le lendemain de me réveiller de me mal de me tête à savoir je suis qui et où et là et moi qui dis je veux développer avec toi et pour cela, je t’ai appelé pour te raconter et tu m’as dit c’étaient des putes. 

J’ai dit tu as meilleur goût qu’elles

EUH.

J'ai dit je t'aime comme un mort-vivant tu te rappelles et si tu te rappelles je souris parce que moi ça m’échappe ;

et si ça t'échappe je crierai au meurtre que ça t'échappe et pour développer quelque chose de sérieux avec toi, je crierai 

TON NOM.










Le rosier de Samos



I

Je n’ai pas d’histoire à raconter. J’ai bien essayé d’en écrire une... Il y avait cette histoire d’un mec nommé Samos, un mec super fiable super gentil avec une petite amie super sexy qui dormait nue ou en petite culotte en tout cas avec presque rien. Samos lui offrait une rose chaque matin enfin, l’histoire c’est qu’il y avait dans le jardin de Samos un rosier et chaque matin, avant le réveil de sa copine, il allait cueillir une rose à même son jardin et la lui offrait en même temps qu’il lui offrait un petit déjeuner au lit. C’était charmant. Elle, puisqu’elle ne visitait jamais le jardin, ignorait nécessairement l’existence du rosier. Elle lui demandait alors d’où provenait la rose. Il lui répondait qu’il l’avait achetée chez un marchant de fleurs dont la boutique était située à trois kilomètres de la maison. Elle trouvait charmante l’idée de parcourir des kilomètres à pieds chaque matin pour acheter une rose en preuve d’amour :

- Vraiment? demanda-t-elle. Tu as parcouru trois kilomètres à pieds pour m’offrir une rose!? Comme c’est romantique!

- Ouais bon, c’est rien! Trois petits kilomètres... ça se fait tout seul! Et ça me fait plaisir parce que je t’aime... Elle est bonne mon omelette?

Et au moment de recevoir la rose et le petit déjeuner, elle disait merci, elle disait c’est très bon et elle demandait un baiser à son amoureux. Il l’embrassait et se disait que l’amour était facile à atteindre : « Je n’ai pas besoin d’aller bien loin pour la rendre heureuse... je cueille une rose dans le jardin et elle m’aime. C’est facile! C’est l’amour! » 

C’était l’amour, oui.

Chaque matin, Samos cueillait une rose et préparait le petit déjeuner. Sa petite amie dégustait le petit déjeuner. Elle reniflait la rose avec le sourire aux lèvres. 

Ça, c’était le premier chapitre de mon histoire. J’ai bien essayé d’écrire la suite, mais je n’ai rien trouvé de bon... enfin... Je peux improviser...

II

L’histoire, c’est qu’un jour, il ne resta plus une seule rose dans le rosier de Samos. Il dût quitter la maison pour aller en acheter une. Il trouva un fleuriste à deux coins de rue. C’était à cinq minutes de chez lui. Plus loin que le jardin, certes, mais rien de catastrophique. Cinq cents mètres tout au plus. Il acheta une rose chez le fleuriste et revint à la maison préparer le déjeuner. Omelette aux champignons. Il offrit le petit déjeuner à sa petite amie. Elle le prit en remerciant son amoureux :

- Oh vraiment? Tu as parcouru trois kilomètres encore ce matin pour m’offrir une rose! Merci mon chéri! Tu es trop gentil! Une belle rose... Hmm ça sent si bon. Et ton omelette est si bonne!

Aussi, elle demanda un baiser. Elle lui murmura un je t’aime à l’oreille. Il lui demanda si elle avait bien dormi. Elle répondit j’ai fait un cauchemar horrible : j’ai rêvé que je me réveillais ; mais tu n’étais plus là à mon réveil. 

Et c’était l’amour.

C’est ce qui clos le deuxième chapitre de mon histoire... Je sais c’est mauvais! Ah mais j’ai bien cherché une suite... Mais je n’ai rien trouvé. Sauf peut-être ceci que j’improvise à l’instant, mais soyez indulgents...

III

Un matin, alors que sa petite amie dormait encore, Samos sortit acheter une rose chez le fleuriste. À son grand désespoir, le fleuriste avait fermé ses portes. Il apostropha plusieurs passants pour leur demander où se situait le fleuriste le plus proche :

- Oh c’est loin! dirent les passants. À environ trois kilomètres d’ici, il y a une boutique qui vend des fleurs... Vous pourriez trouver une rose là-bas!

Samos se mit à courir sur le trottoir vers cette boutique. Il était à peine sept heures le matin. On aurait dit qu’il faisait du jogging. Et cette idée dégoûtait Samos. Il n’était pas un adepte du jogging. Mais pour son amour, il laissa tomber l’apparence et continua de courir.

Il revint à la maison vers huit heures une rose à la main. Il prépara le petit déjeuner. Omelette aux champignons. Il offrit tout cela à sa petite amie et, à peine réveillée, elle le remercia :

- Oh merci. Tu es très gentil! Elle a l’air vraiment délicieux cette omelette! Et elle sent vraiment bon cette rose!

- Oui, elle a intérêt. Sent-la! Sent-la!

- Oui, oui, je la sens... Hmm elle sent très bon!...

- Non mais! J’ai parcouru trois kilomètres pour cette foutue rose!

- Mais elle sent très bon ta rose chéri!

- Tu peux pas comprendre... Fait chier... Une stupide rose... Trois kilomètres! Tu te rends compte?!

- Mais tu le fais tous les matins! Pourquoi ce matin ça t’ennuie? 

- Parfois, j’ai envie d’une pause tu comprends?! J’en ai marre de courir trois kilomètres chaque matin alors que toi tu restes couchée! Paresseuse! Moi je viens de courir trois kilomètres!

- Mais je t’oblige à rien ch...

- Chérie! Lève-toi. Fais-moi une omelette. J’ai faim...

- Mais t’as jamais faim le matin!

- Là, j’ai faim. Je viens de courir trois kilomètres! Merde!

- Je vais à la toilette... Je reviens.

Et se dirigeant vers la toilette, elle jette un coup d’oeil au jardin par la fenêtre. Elle se rend bien compte qu’il n’y a plus de roses dans le rosier de Samos. Toutefois, une rose encore toute verte et fermée tarde à éclore. Elle sort la cueillir.

Elle rentre. Prépare deux oeufs et deux rôties tandis que son petit ami s’est rendormi. Et dans l’assiette, elle dépose le bébé-rose tout vert fraîchement lavé. 

- Chéri! Ton petit déjeuner!

Samos rouvre les yeux. 

- Non...! T’as fait ça?!...

- Bon d’accord, elle est encore toute verte et elle sent rien... 

- Mais... C’est un début...!

Il sourit.
Et là, seulement là. 
L’amour. 

Romantic.





À la prochaine.

17 juin 2009

Refaire sa vie



Je suis un peu perdu dans la vie. J’ai tenté de retrouver mon chemin dans la politique.

À gauche à droite d’un côté hop ; un politicien voulant me faire voter pour lui et de l’autre, un politicien voulant me faire voter pour lui. Je n’y ai vu aucune différence alors j’ai cherché ailleurs je suis retourné voir ma famille.

Une mère à gauche un père à droite hop ; d’un côté une mère voulant me faire retourner chez elle et de l’autre, un père voulant me faire retourner chez lui. Je n’y ai vu aucune différence alors j’ai cherché ailleurs je me suis fait deux petites amies.

L’une à gauche l’autre à droite hop ; l’une voulant me faire travailler pour elle et l’autre, voulant me faire travailler pour elle. Je n’y ai vu aucune différence alors j’ai cherché ailleurs je me suis fait des amis drogués.

L’un de la coke et l’autre du speed ; l’un voulant que je le paie d’ici trente jours et l’autre, voulant que je le paie d’ici trente jours. Je n’y ai vu aucune différence alors j’ai cherché ailleurs de jolies petites putes pas chères.

L’une demandait trente dollars pour une pipe et l’autre zéro. J’ai eu beau m’enfuir avec la deuxième, le gars de la coke m’a rattrapé pour me couper un doigt. Ma petite amie m’a quitté en me traitant de dégueulasse. Ma famille n’a jamais osé me reprendre : ma mère a crié devant mon doigt et mon père m’a traité de junky. Et le politicien : rien.

il m’a oublié.

L'astre





Des astres s’étiolent et s’astrent parmi les astres je crois, que le mot astre fut suffisamment nommé et j’ai dit astre encore, et d’autres se sont dit ça suffit. Alors j’ai dit astre. Et re-astre. Rien que pour faire.

On hait. Alors on se demande si l’on est vraiment. Puis on se dit non, au fond j’aime. Alors on aime vraiment. Sans plus poser de question. On aime.

D’autres astres se sont multipliés cette nuit je crains pour leur survie il est une chose certaine : plus il y aura d’astres, moins il y aura de place pour nous ;
et cela malgré leur vitesse-de-la-lumière! Je crains.

On craint. Alors on se demande ce que l’on craint vraiment. Puis on se dit rien, au fond j’ai confiance. Alors on aime vraiment. Sans plus poser de question. On aime.

Hé ho ha un dernier astre un dernier, je crois en avoir vu un dernier s’allumer derrière toi ; quoique ta mèche de cheveux me cachait et le verre que tu tenais projetais une étrange lumière comparable à celle d’un astre qui s’allume enfin... crois-tu?

On croit. Alors on se demande à quoi l’on croit vraiment. Puis on se dit rien, au fond je crois en toi. Alors on aime vraiment. Sans plus poser de question. On aime.

Un astre encore celui-là filant dans le ciel j’ai dit ça y est en voilà un autre et celui-là bougeait! ; j’ai dit heureux celui-là bougeait je fais un voeux!

Tu m’as demandé quel était mon voeu et j’ai dit tu peux me haïr tu peux me craindre mais s’il te plaît crois-moi je t’aime.








Paris - Erquy




Tu t’inquiétais à savoir notre voyage ; j’ai dit quel voyage tu m’as dit celui-là j’ai dit quel ; celui de Bretagne et d’Angleterre je me suis tu ; tu t’es toi et les lumières sur une rue ce sont allumées pour toi j’ai dit pourquoi ; parce que je ne voulais plus respirer un moment trop fort, quand c’est trop fort je cesse tout et l’émotion, quand c’est trop fort je cesse l’émotion et ce qui vient avec ; j’ai dit c’est-à-dire la respiration et j’étais à dire la respiration quand tu as dit deux hublots ; j’ai dit quoi? 

Deux hublots pour nous deux tu as dis nous en voulons deux pour une seule avion j’ai dit ; deux hublots pour deux personnes c’est un peu trop ne pourrions-nous pas regarder au-travers du même? ; semble-t-il non, tu as dit il me semble que non.

J’ai pleuré.

Le soleil se levait sur les travers de ce que le hublot me renvoyait d’opaque et de non-bombé et les dernières mouettes s’effrayaient au loin six pieds sous-ciel je priais ; que l’avion demeure et que ma demeure avionne ; tu m’as dit tu dis de ridicules choses j’ai dit tes choses sont ridicules nous nous sommes bien entendus et tu as mis une chose, un fond de teint sur ta peau exaspérée par le stress des manoeuvres je t’aime.

J’ai ri.

De curieux mouvements provenaient de ma cuisse et j’ai pensé pisser puis j’ai pensé à ma vessie puis j’ai pensé je n’ai point envie de pisser alors de quoi ai-je envie j’ai pensé ;

de toi ; j’ai tourné la tête mais il n’y avait que ce soleil levant qui roulait sur moi, m’aplatissant sur le sol comme une langue morte par terre et j’ai dit hé, que fais-tu soleil, à m’aplatir alors que tu te trouve à des éternités dans les nuages?!

J’ai dormi.

Et sur le ciel j’ai crié sans voix qu’il me fallait te revoir, et que s’il ne se devait pas il se fallait j’ai prié ; te revoir à Paris mais tu n’y étais pas ; débarqué de l’avion je t’ai cherchée ; vers la Bretagne j’ai cherché quelques trains qui déversaient de la masse et j’y suis embarqué tout à fait naïf, tout à fait naïf porté par le rouage de la rail et fin de compte me voilà à Erquy en une ville dont j’ignorais l’existence.

En cette ville, pourtant, ton visage m’apparaît indemne et radieux malgré le manque de soleil, malgré la naïveté te voilà. Tu viens me chercher comme l’enfant que tu n’attendais pas. Et je t’attends, comme la mère que je n’ai jamais attendue.

Punch.

Depuis le début





Aucune utilité à écrire ce que j’écris je voyagerai les azurs je voyagerai l’ultime des pays vers les autres, ces autres que l’on redoute je voyagerai les hôtels bourrés de draps dans l’espoir de redouter voir ce que j’ai vu ailleurs et toi, tu me suivras tout étant toi je voyagerai, démantibulé par les recoins des décors nouveaux et je souffrirai à chaque cathédrale je dirai My god this is a cathedrale! et tu ne diras rien, tu ne diras rien de tout le voyage et nous changerons de pays et je verrai les décors d’ailleurs encore, tout aussi époustouflé de voir les autres et je dirai My god this is another cathedrale! mais tu ne diras rien et je t’embrasserai pour la peine, quelques larmes sur le front parce que j’ai eu chaud, je dirai tu souffres tu répondras non, je dirai o.k. et nous prendrons le train vers Paris et d’autres encore et je dirai My god this is a new cathedral! et tu ne diras rien alors je dirai Mais pourquoi tu ne dis rien et tu répondras le front plein d’eau et les yeux tout autant : je t’aime depuis le début...

15 juin 2009

L'une et l'autre

Deux filles.

L’une dit à l’autre la lune dit à l’autre ; mais qui est l’autre? dit l’autre ; c’est toi! dit l’une ; et l’autre de répondre oui mais toi, tu dis quoi?

L’une dit à l’autre la lune dit à l’autre je déteste cet autre! L’autre dit à l’une : là, dans le ciel, c’est la lune? ; et l’une de répondre : cet astre-là? Non, dit l’autre, l’autre! ; L’autre... c’est toi? demande l’une ; Non, c’est la lune! répond l’autre ; Ah! Celle-là! Et comment elle s’appelle? ; Lune, dit l’autre ; Ah! Comme moi? dit l’une.

L’autre demande à l’une la lune dit quoi à l’autre? ; L’une dit la lune dit à l’autre je déteste cet autre! ; mais qui est cet autre? demande l’autre ; Le soleil! dit l’une, le soleil est l’autre de la lune! ; et moi je suis l’autre de quel autre? demande l’autre. L’autre d’aucun autre, dit l’une, tu es l’autre de moi.

L’une dit à l’autre la lune dit à l’autre je te déteste, car chaque fois que tu es là, je ne suis pas là! ; quand tu es là, est-ce que je suis là? demande l’autre. Nous sommes là, dit l’une ; nous sommes là, mais moi, est-ce que je suis là? Non, dit l’une, tu n’es pas là, puisque nous sommes là! ; je ne peux pas être là sans que nous soyons là? demande l’autre ; si tu es là quand je suis là, c’est que nous sommes là et si nous sommes là, nous sommes et peu importe si tu es...

L’autre dit à l’une je comprends la lune de dire à l’autre je te déteste! ; pourquoi? demande l’une ; quand tu es là, nous sommes là et je ne suis plus là! dit l’autre. Oui, mais si l’une n’était pas là, l’autre ne serait pas là, dit l’une...

L'orage




c’est l’orage et mes êtres se disputent
une place ou l’autre
« pour autant que cette place soit à proximité de l’autre »

c’est l’orage et les fougères s’agrippent
aux dernières feuilles du fraisier

elles font mourir les fruits
comme de petites étrangleuses
belles mais jalouses

mes êtres se disputent ma tête
pour se couvrir du tonnerre
ils désertent l’endroit des oreilles

mes oreilles vides
cessent enfin leurs voix

en l’absence de mes êtres
enfin j’entends parler
mes propres voix

Les praloquences



j’ai rêvé de la ville
astronaute sur la terre
et j’ai cueilli
les praloquences

dans son costume blanc d’oxygène
la ville trop gênée
a tu ses premiers pas
sur le premier bouquet
de praloquences

tu es celle qui jamais
ne parle
qui jamais ne sait
mais qui sait
que je sais

tu murmures sans cesse
le mal des praloquences

*

dans tes rêves
le doré du fleuve les a nourries
mais tu n'as pas mangé la racine

*

la ville a jeté son scaphandre
et ton coeur supplie
mes pas sur les champs

tu supplies la ville
de retourner aux tulipes

tu supplies la ville
de retourner aux cellules

pour ton mal et tes murmures
je veux le faire pour toi
j’irai cueillir
les dernières praloquences

Presque




tout ce que j’ai écrit
m’apparaît écrit

dans les digues de l’orage
dans l’insonorisation des nuages

le nuage vibre
retient l’éclat
n’y parvient pas

retient le boom
n’y parvient pas

retient la pluie
n’y parvient pas

retient la couleur

y parvient presque

*

muette comme un bloc
mon écriture se résorbe
en un cadre spécifique
comme la frasque d’une goutte
éteinte d’eau
sur ma vue

mon écriture s’est gonflée
sans être vue
dans un clos espace
dans l’alvéole d’une moustiquaire
gorgé d’une goutte

la goutte tisse
retient les insectes
n’y parvient pas

retient les fuites
n’y parvient pas

retient le noir

y parvient presque

*

un insecte noir perce la moustiquaire
qui fait cloison
entre l’écriture et moi

pour gagner l’intérieur
et vivre
sans être noyé

l’insecte s’infiltre
une première patte
n’y parvient pas

une deuxième patte
n’y parvient pas

une troisième patte

y parvient presque

*

un être minuscule
aligné - encadré - parvient presque
à sortir de mes cadres

il rejoint presque
ma nature

mon ventilateur vibre
à quatre pattes tournantes il parvient
éclate boom et pousse la pluie

*

alignée - encadrée - paginée
mon écriture subsiste aux fléaux
mais subsistera-t-elle à elle-même

sur les flocons secs d’une lèvre
sur les frises d’un balcon

*

l’écriture veut parler
n’y parvient pas

veut sortir
n’y parvient pas

veut percer

y parvient presque

*

l’insecte y parvient presque
une patte de plus et ça y est

le ventilateur éclate boom et pousse
l’insecte



presque
ne sera jamais suffisant

11 juin 2009

Pour qui




Je suis à des kilomètres
De savoir pour qui je sens

Mais une bouche avare
De respirer les liquides
Mais une lune à qui l’on veut
Gratter le ciel

Le voeu d’un os de poulet mort

Quand une bouche me crie
Me respire la sueur
Quand une lune se disqualifie
Du combat des étoiles

Je me dis pour le reste
C’est pour elle que je sens

De la faune à moi





Des idées parfois viennent 
En tête parfois
Viennent t’entête parfois

En forêt
Le tronc de l’un
Est souvent celui de l’autre
Et se mêle la vitesse
Et les fleurs saccadées 

À la ferme
L’herbe de l’un
Se retrouve dans l’autre
Et nul ne commente
Et nul ne se lamente

À la maison
Le frigo est souvent
Le mien
Et nul ne paie
Et nul n’offre

Mais tous prennent
De la faune à moi
Du mouvement à la cécité

La révolte



I

Mirandole : Je ne nettoierai plus la table! Jamais!

François : Mais la table doit être nettoyée! Par qui?

Mirandole : Des idées.

François : Les idées ne peuvent pas nettoyer! Jamais!

Mirandole : Elles encombrent.

François : Et je nettoie. Toujours. C’est toujours moi.

Mirandole : Et j’encombre?

II

François : Qui nettoiera la table avant chaque repas? Il faut décider! Maintenant! Sinon quoi, nous mangerons dans la saleté?

Mirandole : Comme les petits chiens retrouvés aux bords des chemins de fer...

François : Tu en as vus? Même eux, ils sont plus propres que notre table...

Mirandole : Notre table? Ah, maintenant ce n’est plus ta table? C'est notre table! Quand c'est sale, tu dis toujours nous! Et quand c'est propre tu dis tu!

François : Tu te révoltes. Tu n’as pas de syndicat pour te révolter.

Mirandole : L’injustice.

François : Où as-tu appris ce mot?

Mirandole : C’est la justice qui me l’a dit.

François : Et la beauté t’a dit la laideur? Et la religion t’a dit l’athéisme? N’importe quoi...

Mirandole : Les juges n’ont pas d’identité.

François : Mais même! Ce mot n’entre pas dans ma maison!

Mirandole : Ta maison? Notre table. Et moi j’ai quoi.

François : Ton coin! Ton coin! Préserve ton coin!

Mirandole : Des coins, il y en a mille ici. C’est une maison concave.

François : Concave? Ahhh!!! D’où sortent tous ces mots?!?

Mirandole : Un géomaticien que j’ai croisé. 

François : Tu croises trop de gens!

Mirandole : Mais je ne croise que des gens qui ne me disent qu’un mot. Un seul.

François : Mais ces mots te servent trop! Tu as peu de vocabulaire. Et le peu que tu as me nuit considérablement.

Mirandole : Voudrais-tu que j’en aie davantage et que je puisse converser avec toi?

François : Stop! C’est ridicule. Ne parle pas.

Mirandole : Ma bouche en veut à la tienne.

François : Elle veut quoi?!

Mirandole : Dix dollars. Purs et simples. Dix vrais dollars pour une vraie veilleuse.

François : Mais tu m’énerves avec ta veilleuse! 

Mirandole : Toi tu peux dormir toutes les nuits! Moi, je ne dors pas! C’est fatigant! 

François : Tu n’as qu’à cesser d’avoir peur...

Mirandole : Dix dollars! Dix dollars ou je me fâche!

François : Tu ne sais pas te fâcher.

Mirandole : Ton bain!

François : Quoi mon bain?!

Mirandole : J’ai vu des microbes dedans. Des microbes que tu ne vois pas...

François : C’est impossible! Chez moi, tout est propre! Tout est impeccable!

Mirandole : J’en vois pourtant.

François : Montre-moi!

François et Mirandole s’en vont à la salle de bain.

Mirandole : Là. Des microbes. Partout.

François : Vraiment?! Tu as de bons yeux?! Je ne te crois pas! Tu mens! Tu inventes! Il n’y a pas de microbes!

Mirandole : Bien sûr qu’il y en a... Je les vois, je les salue. Tout ça...

François : Tu mens! Tu hallucines!

Mirandole : J’hallucine ce que je veux voir, et ce que je veux voir est tout à fait vrai.

François : Tu as de bons yeux?!

Mirandole : Meilleurs que les tiens. 

François : Tue-les! Tue-les!

Mirandole : Dix dollars. 

François : Oui, voilà, tes dix dollars! Maintenant tue-les!

Mirandole prend un chiffon. Il le passe négligemment sur les parois du bain.

Mirandole : Je les vois plus. Ils ont disparu. Des choses, comme ça, qui arrivent...

François : Ils sont partis?! Vraiment?

Mirandole : Oui, tout à fait. Je leur ai fait peur. Je ne vois plus rien. 

François : Tu n’as pas de bons yeux?!

Mirandole : Je vois tout de même. Je ne vois qu’une seule chose : ma nouvelle veilleuse... Et dormir... Dormir.





L'économie 2 (le travailleur)


I

Le lendemain matin.

Mirandole : Je veux laver ta table.

François : Bien! Tu acceptes mon offre? Si tu laves ma table ce matin, tu auras un dollar.

Mirandole : J’ai compris. Il faut accumuler l’argent. Si j’accumule suffisamment, j’aurai de quoi m’acheter une veilleuse.

François : Une veilleuse?

Mirandole : Oui, une veilleuse. Pour dormir dans le noir sans avoir peur. J’ai compris que j’avais réellement besoin de cette veilleuse. Et je suis prêt à laver ta table.

François : Bon! Voilà le chiffon. Tu nettoies. Moi, je vais travailler. Quand je reviendrai, je veux que ma table soit propre.

Mirandole : Elle le sera!

II

François revient de travailler. Il entre dans la salle à manger.

Mirandole : J’ai fini de nettoyer ta table!

François : Du bon travail! Voilà un dollar. 

Mirandole (souriant) : Un dollar! Un vrai!... Ma veilleuse en coûte dix... Encore neuf jours et j’y suis!

François : Pas si vite... Il faut payer l’impôt!

Mirandole : L’impôt? C’est quoi?

François : C’est vingt-cinq sous. Il faut aussi verser un petit montant pour le syndicat...

Mirandole : Le syndicat?! C’est quoi???

François : C’est vingt-cinq sous! Et le 4%.

Mirandole : 4%?

François : C’est vingt-cinq sous. Et tes cartes.

Mirandole : Mes cartes?

François : Oui, tes cartes. Il faut que tu sois certifié. Il faut que tu sois conformes aux nettoyeurs de table. Si tu veux être un vrai nettoyeur de table... Il faut que je te certifie! C’est vingt-cinq sous.

Mirandole : Mais je n’ai pas vingt-cinq sous... Je n’ai qu’un dollar...

François : Pas grave. Donne-le-moi. Je te rendrai la monnaie.

François prend le dollar.

Mirandole : Et ma monnaie?!

François : Tu l’as déjà, ta monnaie...

III

Mirandole : J'ai zéro dollar, zéro sous... Encore neuf jours... dix jours!... Combien de jours avant de pouvoir acheter ma veilleuse?

François : À moins de découvrir une nouvelle formule mathématique qui prouverait le contraire... C'est impossible.

L'économie


I

Dans la salle à manger, Mirandole nettoie la table.

Mirandole : J’ai terminé de laver ta table!

François : Du beau travail! Tiens, voilà cinquante sous...

Mirandole : Cinquante sous! Je vais m’acheter quelque chose! Qu’est-ce que je pourrais bien m’acheter?...

François : Pour cinquante sous? Tu peux rien t’acheter...

Mirandole : Rien?! Pourquoi tu me donnes cinquante sous alors? Si ça ne vaut rien!

François : Il faudrait que tu laves ma table une deuxième fois...

Mirandole : Une deuxième fois?!

François : Si tu la relaves demain, je te donnerai encore cinquante sous. Ça te fera un dollar.

Mirandole : Et je pourrai m’acheter quelque chose?!

François : Avec un dollar? Pas tout à fait non... Mais si tu relaves ma table une troisième fois!... Ça te ferait un dollar cinquante.

Mirandole : Et là je pourrais m’acheter quelque chose!

François : Non pas encore. Il te resterait à laver ma table une dernière fois. Et là, tu aurais deux dollars. Tu aurais de quoi t’acheter un café.

Mirandole : Un café? Mais je ne bois jamais de café... 

François : Eh quoi, je ne savais pas que tu ne buvais pas de café... C'est vrai?

Mirandole : Ça ne vaut rien! J’ai tout fait ça pour rien!

Mirandole jette son cinquante sous dans la poubelle et quitte la salle à manger.

François fouille dans la poubelle. Il reprend le cinquante sous.

François : Hé! Mirandole! Reviens!... 

Mirandole revient dans la salle à manger.

François : J'ai une offre à te faire!... Si tu laves ma table demain, je te donne soixante-quinze sous!

Mirandole : Mon salaire a augmenté?

François : Je trouve que tu travailles bien. Tu le mérites...

II

Le lendemain, Mirandole nettoie la table de la salle à manger.

François : Du beau travail! Tiens, voilà soixante-quinze sous, comme promis.

Mirandole : C'est plus qu'hier, mais je peux m'acheter quoi avec ça?

François : Rien... Mais si tu relaves ma table encore trois fois, ça te fera quatre dollars! Tu auras de quoi t'acheter DEUX cafés!

Mirandole : Mais?! Je ne bois pas de café! Ça ne vaut rien pour moi!

Mirandole jette son soixante-quinze sous dans la poubelle et quitte la pièce.

François fouille dans la poubelle et ramasse l'argent.

François : Attends! J'ai une autre offre! Si tu laves ma table demain, je te donne un dollar!


9 juin 2009

L'amour impossible

Situation initiale

L’eau voulait devenir vague pour bouger.
La vague voulait devenir poisson pour nager.
L’eau est devenue vague.
Mais cette vague était déjà poisson.

Le poisson voulait devenir cheval pour galoper.
Le cheval voulait devenir oiseau pour voler.
Le poisson est devenu cheval.
Mais ce cheval était déjà oiseau.

L’oiseau voulait devenir nuage pour flotter.
Le nuage voulait devenir pluie pour pleurer.
L’oiseau est devenu nuage.
Mais ce nuage était déjà pluie.

La pluie voulait être terre pour s’arrêter.
La terre voulait être tige pour pousser.
La pluie est devenue terre.
Mais cette terre était déjà tige.

La tige voulait être fleur pour se faire butiner.
La fleur voulait être abeille.
La tige est devenue fleur.
Mais cette fleur était déjà abeille.

Élément déclencheur

L’abeille voulait devenir poisson pour nager.
Mais le poisson était déjà cheval.

L’abeille voulait devenir cheval.
Mais le cheval était déjà oiseau.

L’oiseau était déjà nuage.
Le nuage, déjà pluie.
La pluie déjà terre.
Et la terre déjà tige.

La tige était déjà fleur et cette fleur déjà abeille.

Situation finale

Moi, je voulais être toi
Toi, tu voulais être elle
Je suis devenu toi
Mais tu étais déjà elle


Le coiffeur

I

François : À quoi tu penses?

Mirandole : Je pense à ce que j’ai dans la tête.

François : Qu’as-tu dans la tête?

Mirandole : Une chose à laquelle je pense...

II

Mirandole : Dans ma tête, il y a un chapeau.

François : Et sur ta tête?

Mirandole : Il y a le chapeau que j’ai dans la tête...

III

François : Tu as dans la tête ce qui est sur ta tête?

Mirandole : Non. J’ai sur la tête ce qui est dans ma tête.

François : La différence?

Mirandole : D’abord c’était dans ma tête. Puis sur ma tête.

IV 

François : À quoi je pense?

Mirandole : Tu penses à ce que tu as dans la tête...

François : Et qu’ai-je dans la tête?

Mirandole : Des cheveux.

V

François : Je pensais justement à mes cheveux. Je suis déçu du travail de mon coiffeur...

Mirandole : Attends une seconde. Il y a quelque chose qui bouge dans tes cheveux!

François : Ça doit être un reflet du gel de mon coiffeur...

Mirandole : Non ce n’est pas ça.

François : Ça doit être les poux que mon coiffeur m’a refilés?

Mirandole : Non ce n’est pas ça!

François : Ça doit être...

Mirandole : C’est ton coiffeur!

VI 

François : Comment peux-tu être certain que c’est mon coiffeur?

Mirandole : J’ai pensé : ton coiffeur est dans ta tête. J’ai pensé regarder sur ta tête. Et effectivement, ton coiffeur...

François : Non ce n’est pas possible.

Mirandole : Puisque je te le dis! J’ai pensé : ton coiffeur...

François : Attends! Quelque chose bouge dans tes cheveux!

Mirandole : Qu’est-ce que c’est?!

François : Mon coiffeur.




8 juin 2009

Découverte



I

J’ai découvert une chose. J’ai quelque chose à dire de sérieux. Je suis une personne très très sérieuse et j’ai quelque chose à dire de sérieux de très sérieux il faut m’écouter. J’ai découvert quelque chose. Une chose très curieuse qui dévoile un aspect ultra-curieux au sujet de la race humaine.

J’ai regardé les êtres humains. Je les ai observés. Je les ai étudiés. Et j’ai découvert cette chose curieuse qu’il me tarde à vous dire.

J’ai découvert cette chose alors que je mangeais seul assis à ma table. Je mange souvent seul. Souvent, pour me sentir en osmose avec le reste de la race humaine. Je me fais bouillir des brocolis, et puis le steak poivré. Et je mange l’osmose.

Ce que j’ai découvert au sujet des êtres n’est pas banal : il n’est maintenant plus question d’amour ; plus jamais il ne sera question d’amour. Car j’ai découvert une chose odieuse au sujet de vous. Vous qui êtes êtres.

1. Un cheveux, c’est comme le passé : on en coupe toujours des parties en pensant que ça le rendra plus beau mais au fond, on regrette toujours notre incapacité à le refaire pousser. Mais ce n’est pas ce que j’ai découvert.

2. La vie, c’est comme une paille. On veut tous siphonner ce qu’elle recèle de meilleur, mais certains, dans l’urgence de vivre, l’écrasent entre leurs dents. Et tout cela se termine par l’alarme bruyante d’une aspiration vers le fond : FRRRRRR. Mais ce n’est pas ma découverte.

3. Apprendre un nouveau mot, c’est comme du rince-bouche : on le fait tourner dans notre bouche pendant deux secondes, et on le recrache tout de suite après pour faire sensation. Mais ma découverte est bien meilleure.

J’ai découvert cette chose étrange alors que je mangeais assis à ma table. Et la découverte m’a semblé si étrange qu’elle m’a coupé l’appétit. Je n’ai pu finir mon assiette :

« Les brocolis causent le cancer. »

Mais ce n’est pas ma découverte. J’ai découvert cette chose universelle qui troublera l’ordre du monde. Et je ne suis pourtant pas du genre à troubler l’ordre du monde. J’aime que le monde soit ordonné. J’aime que le monde soit à son affaire.

Je ne sais que faire de ma grande découverte. Tantôt je me dis tant pis, ils deviendront robots de toute manière ; tantôt je me dis il est de mon ressort de préserver leur état. Je dois leur dire :

« Le steak poivré ne vient pas du boeuf, mais de la vache qui poivre. »

Mais ce n’est toujours pas ce que j’ai découvert. Je dois l’affirmer clairement. Sans hésitation. Peu importe ce qui arrivera après mon affirmation révélatrice. Je dois tout dévoiler, sans mensonges :

« Le système solaire est un ragoût de boulettes. »

Mais ceux qui m’entendent rient de moi. Ils ne croient pas à ce que je dis. Et avec raison. Ce n’est pas du tout ce que j’ai découvert. J’ai découvert une autre chose beaucoup plus étonnante. Mais j’hésite à la dire. Par honte, peut-être. J’ai honte d’avoir découvert cette chose avant tous les autres êtres. Je ne suis pourtant pas génial. Alors pourquoi cette révélation m’est-elle apparue :

« Ceci est mon sang : buvez mes frères ; ceci est mon poulet général-tao : mangez mes frères. »

Certes, j’ai eu cette révélation. Mais jamais je n’ai vérifier sa signification dans la Bible. Toutefois, ce n’est pas ce que j’ai découvert, au contraire, ça n’a rien à voir. Ce que j’ai découvert vous concerne tous. Tous sans exception. Cela concerne tous les êtres qui mangent et marchent. Assurément, cela vous concerne, puisque dans ma découverte même, il est question de nourriture et de locomotion. Et vous mangez et vous marchez :

« Les handicapés anorexiques seront les premiers à mourir »

II

Je crois en Dieu. Sincèrement. Je crois sincèrement que c’est Dieu qui m’a choisi. Il a dit : Toi, tu seras celui qui découvriras le sort de l’humanité ; et il te revient de leur apprendre quel sera leur sort.

Il me revient d’apprendre de leur quel quoi? Je n’ai rien compris à ce qu’il disait, mais une chose est sûre :

« J’ai découvert de quoi ; faut vous apprenez c’est quoi j’ai découvert. »

Je vous ai déjà annoncé le lien de ma découverte avec l’amour : l’amour n’existe plus. Vous vous demandez pourquoi? Une série de raisonnements m’ont prouvé la non-existence de l’amour chez les êtres :

Chapitre 1 :

1. Je deviens con dès que je rencontre une fille qui me plaît.
2. La fille me parle et je continue d’être con.
3. Elle m’aime même si je suis con.
4. Je suis con de sortir avec elle.

Chapitre 2 :

1. Il faut s’accoupler pour se reproduire.
2. Certains trouvent ça con de s’accoupler.
3. Certains trouvent ça con de se reproduire.
4. Être en couple, c’est con.

Mais ce n’est là qu’un résumé des deux chapitres sur l’amour ; chapitres que j’ai élaborés longuement alors que je mangeais ; chapitres qui ont résulté en une conclusion fort audacieuse que j’appelle Ma Découverte.

Mais ma découverte ne se résume pas qu’à l’amour. Elle englobe l’être dans sa totalité. Par là, je désigne la vie. Ma découverte touche directement la vie des êtres :

Chapitre 3 :

1. La vie mène inévitablement à la mort.
2. On veut vire.
3. On ne veut pas mourir.
4. On est dans marde.

Chapitre 4 :

1. On veut vivre plus longtemps.
2. Les robots vivent longtemps.
3. On est toujours ce qu’on veut être.
4. On est des robots.

Ce n’est là que les fondements de ma découverte. Et déjà, vous paniquez à l’idée d’une découverte logiquement plus forte. Laissez-moi vous l’énoncer.

Mon but ici n’est pas de réécrire le livre que j’ai publié sous le nom de Dr. Jermy Sastirch. Ce n’est pas mon intention. Je n’indique que les lignes premières. À vous de déduire le reste. Mais il n’en demeure pas moins que ma découverte troublera le monde. Les êtres sont ce qu’ils sont ; mais ils sont tout autrement selon les comportements qu’ils adoptent.

« Dominique dit - Je suis Dominique - ; mais elle refuse de parler à Jonathan. Elle est donc - Dominique refusant de parler à Jonathan - »

Suivant la même logique, nous ne sommes qu’une partie de nous-mêmes. Je ne suis, moi, qu’une partie de moi-même non-écrivante, alors que l’autre écrit. Et puisque chaque être désire vivre aussi longtemps que possible, chaque être se résume à être :

1. Émilie voulant vivre aussi longtemps que possible ;
2. Rachel voulant vivre aussi longtemps que possible ;
3. Charlotte voulant vivre aussi longtemps que possible ;
4. William voulant vivre aussi longtemps que possible ;
5. René voulant vivre aussi longtemps que possible ;
6. Second Cup voulant vivre aussi longtemps que possible ;

Mais puisque ce que nous connaissons comme vivant le plus longtemps possible demeure l’objet :

1. Newport synthé
2. Salsa piano
3. Serge Ipod
4. William Macbook
5. Linksys
6. Second cup voulant vivre aussi longtemps que possible ;

Et accumulant les chapitres que j’ai écrits lorsque je mangeais, assis seul à ma table, une révélation m’est venue. En additionnant les suppositions, j’ai découvert. Voilà où s’en vont les êtres. Voilà où ils s’en vont! C’est terrible! Et je me suis dit, dégustant le steak poivré, c’est terrible! Et un peu de citron sur mes brocolis... oh les câpres c’est âcre... C’est terrible! Comment vais-je leur dire, à tous ces êtres, que voilà ce que l’avenir vous réserve? Un peu de sel!

Le sort est terrible. Et les oignons rouges? Je ne peux imaginer ce qu'ils deviendront. Et j’ai mangé du boeuf. Un peu d’estragon. Et j’ai essayé mes brocolis gratinés. C’était comme une lasagne mais en mieux. Les feuilles de salade à côté, vous pensez quoi... Tous des robots! Je ne les manges pas... La salade, j’aime mieux avec la vinaigrette. Un peu de moutarde. Oh la moutarde! La perte des sentiments. Le steak, parfaitement cuit. On dévore! On se dit, les robots ont des sentiments. Presque cru j’adore. Et l'os? On ne le sent pas. Peut-être je l'avale. Peut-être j’avale absolument tout sans m’en rendre compte? Et on avale. Et sans réfléchir, on avale. Et j’adore avaler. Juste... Avaler...

Go!

Introduction

François : C’est un nouveau texte.

Mirandole : Et alors?

François : J’adore la nouveauté.

Mirandole : Ce n’est pas très nouveau... Je suis encore moi. Et tu es encore toi.

François : Mais nous sommes dans un nouveau texte.

Mirandole : Pourquoi on n’échange pas les rôles? À go, tu es moi! G...

François : Pas besoin d’inverser pour être nouveaux...

Mirandole : On est loin d’être nouveaux, je dirais plutôt qu’on est vieux...

François : Ça dépend de ce qu’on dit.

Mirandole : Je n’ai jamais dit crotte.

François : Tu dépends de ce que tu dis.

Mirandole : Crotte. Je suis nouveau.

François : Non. Tu es jeune.

Mirandole : C’est le jeu. Il faut que tu dises un mot que tu n’as jamais dit! C’est le jeu!

François : Ce n’est pas un jeu. C’est un texte.

Mirandole : Le jeu va nous rendre nouveaux.

François : Je ne joue pas.

Mirandole : Dis un mot!

François : Nouveau.

Mirandole : Tu l’as déjà dit. Tu fais vieux!

François : Je ne joue pas.

Mirandole : Tu l’as déjà dit. Tu fais très vieux!

François : Je ne veux pas être jeune. Je n’aime pas la jeunesse.

Mirandole : Mais la jeunesse fait beaucoup de nouveautés.

François : Je n’aime pas la nouveauté.

Mirandole : C’est nouveau?

Élément déclencheur

Mirandole : Go! :)

François : Je suis toi! Oh mais... Mais! je suis déçu d’être toi! Parce toi, tu es moi! Alors je suis encore moi... Crotte...

365 fois

I

François : J’ai lavé ma table pour la trois cent soixante-cinquième fois aujourd’hui...

Mirandole : Un an déjà! Déjà un an que tu laves ta table tous les matins?

François : Non. Parfois, le matin, je ne la lave pas...

Mirandole : Et quand tu travailles l’après-midi?

François : Je la lave le matin...

II

François : Trois cent soixante-cinq fois aujourd’hui...

Mirandole : Laver une table une fois par jour pendant toute une année. Ça devient une habitude.

François : C’est plus qu’une habitude... C’est une manie.

Mirandole : C’est quoi une manie?

François : Une manie, c’est se laver les mains trente fois par jour.

Mirandole : Je me les suis lavées trente-deux fois aujourd’hui. C’est une manie.

François : Non. Toi, c’est différent. Tu vas souvent aux toilettes.

III

François : Trois cent soixante-cinq fois...

Mirandole : Une fois par jour, ce n’est pas une manie.

François : Tu ne m’écoutes pas.

Mirandole : Je t’écoute. Tu me parles de manie. Et je parle de manie. Alors je t’écoute.

François : Aujourd’hui, je n’ai pas lavé ma table une seule fois...

Mirandole : Oui tu l’as lavée. Tu la laves une fois par jour. 

François : Non. Aujourd’hui, je l’ai lavée trois cent soixante-cinq fois...

IV

François : Trois cent soixante-cinq fois...

Mirandole : Ça fait beaucoup de jours.

François : Beaucoup de fois. 

Mirandole : C’est long à compter.

François : Seulement quand on les compte une par une...

Mirandole : Les comptes-tu toujours?

François : Non. Jamais quand je parle.

V

François : Écoute-moi.

Mirandole : Écoute-moi. Je répète. Alors j'écoute.

François : Ce matin, j’ai lavé ma table trois cent soixante-cinq fois...

Mirandole : Ça fait beaucoup de fois lorsqu’on les compte une par une.

François : Je les ai comptées...

Mirandole : Pourquoi?

François : Je n’avais personne à qui parler...

4 juin 2009

Elle rit encore




Je lui dis je te l’ai dit elle me demande quoi je dis ce que je t’ai dit elle dit quoi je dis je te l’ai déjà dit elle dit quoi je dis je l’ai dit elle dit qui je dis moi elle rit je dis moi et elle rit encore elle dit non moi je dis moi elle dit o.k. dis le moi. 

J’enchaîne cigarette sur cigarette elle me demande tu enchaînes je dis j’enchaîne elle me demande tu fais quoi je dis j’enchaîne c’est ce que je fais tu enchaînes qui je dis quoi elle dit tu enchaînes quoi je dis non qui tu enchaînes qui et elle dit moi je dis moi elle dit non moi je dis moi elle dit o.k. enchaîne moi.

J’écris mot sur mot elle me demande tu écris quoi je dis j’écris mot sur mot elle me demande tu écris quoi je dis mot sur mot et toi tu écris quoi elle dit rien mais à qui je dis à personne et elle dit je suis qui je dis à moi elle dit à moi je dis non moi elle dit o.k. écris moi.

Je dis toi sur toi elle me demande tu dis quoi je dis non qui elle dit qui a dit qui je dis personne elle me demande je suis qui je dis moi elle dit non moi je suis qui je dis je dis toi sur toi elle dit tu dis qu’elle dit tu dis je dis non je dis toi sur toi elle dit o.k. dis moi alors je lui ai dit.

Je lui redis je te l’ai dit elle dit non tu dis toi je dis moi elle dit quoi je dis ce que je t’ai dit elle dit quoi je dis ce que je te redis elle redit quoi je dis tu dis quoi elle dit non je redis oui elle redit quoi je dis n’importe quoi elle redit n’importe quoi je dis voilà elle redit quoi je redis je te l’ai dit elle dit o.k. redis le moi.

Je dis o.k. Pète et Répète sont dans un bateau. Pète tombe à l’eau. Qui reste dans le bateau? Elle dit répète je lui dis je te l’ai dit elle me demande quoi je dis ce que je t’ai dit elle dit quoi je dis je te l’ai déjà dit elle dit quoi je dis je l’ai dit elle dit qui je dis moi elle rit je dis moi et elle rit encore...

Ma couturière




Scintillent les paillettes de son costume elle s’inhume, devant la machine, rapièce d’anciens lambeaux et en crée de nouveaux, comme la charpie des dinosaures elle restaure les costumes et scintille l’écaille des vieux chapeaux.

Ma couturière coud accoudée, toute épuisée frénétique et menée par le sucre du coca-cola qu’elle avale, elle fabrique les costumes d’une pièce de théâtre à laquelle pratiquement personne n’assistera de toute façon parce que bon ce n’est pas bon, dix douze spectateurs tout au plus mais elle se dit il faut travailler et à force de s’efforcer on devient grands ça j’ai lu ça un jour, que je serai grande un jour.

Raccorde les tissus l’aiguille comme une arme minuscule toujours debout, elle s’enfonce à la verticale dans le merveilleusement doux mais ressort de là toujours aussi dure que du métal dur.

Ma couturière a de minuscules doigts qui assemblent comme on soude elle crante, et reprend le zigzag de sa machine absolument, il faut terminer ce costume avant demain, parementures dégueulasses au fond collant des bouteilles de sucre noir elle se dit je vais terminer ce costume détestable, après quoi je vais faire tout à fait autre chose et cette autre chose sera géniale et beaucoup plus haute, après quoi je serai autre chose et cette autre chose sera géniale et beaucoup plus haute.

Tournent les aiguilles de l’horloge derrière une vitre mince elle avale, et s’enlise aux parois sucrées que sont les murs de sa chambre et de la terrible machine.

Ma couturière a de minuscules armes pour se défendre ou pour s’attaquer, à bout, elle lance tous ses vêtements par terre et le costume avec, à bout, elle coud bout à bout ses minuscules doigts et cousus ensemble, ses minuscules forment un énorme auquel elle attache sa fierté, enfin, avec sa grosse main, elle se dit enfin j’ai fini d’être minuscule.

Agacent les aiguilles de l’horloge qui découpent le temps et crantent, insupportables, c’est une attaque à tout ce qui veut coudre.

Ma couturière n’a plus de minuscules armes mais une seule énorme pour attaquer les aiguilles : elle défonce la vitre de l’horloge et c’est une vengeance qu’elle se dit, aiguille vs aiguille! Et l’aiguille l’emporte. Elle l’emporte ailleurs. Et d’ailleurs, l’aiguille l’emportera toujours...

3 juin 2009

Jeunes aveugles

je fouille dans les poubelles
pour que vous puissiez comprendre
mais vous ne comprenez pas

vous jeunes aveugles
ou peut-être illettrés
ce ne sont que des lettres

juxtaposez-les

mais vous n’en faites aucun sens
vous restez pantois
le regard négligeur

fonctionnez

dans le monde il faut
fonctionner alors fonctionnez

j’écris à un oeil
l’autre fermé

vous riez comme des loutres
hélas le biodôme ce n’est pas pour vous
alors vous vous demandez où vous irez

vous n'irez nulle part
tant et aussi longtemps
que vous ne vous prendrez pas pour la loutre
ou le loutre

à vous de choisir
votre sexe
alors vous aurez compris

jeunes aveugles

Ma muse


pas d’école
les ongles poussent

ma muse
a lu me hier

elle a lu mes fantastiques histoires où personne ne meurt où personne n’est témoin d’apparitions où personne ne perçoit personne où personne ne perçoit

où personne ne perce soit
personne
ne perce soit

avec l’école
les ongles se rongent

et personne ne songe
pas même s’amuse

à lire mes hiers mes fantastiques histoires où personne ne chie personne ne crie personne ne han je t’aime mais tout de même, l’argent que je rapporterai lorsque je publierai! oh ça oh! 

l’école pousse
l’école se ronge
pas même s’amuse

et moi
toujours et moi
je ne pousse plus 

et la vie m’amuse

Écris






J’ai besoin de parler. Je n’ai pas besoin d’écrire, j’ai besoin de parler. C’est con les gens qui disent j’ai besoin d’écrire. On n’a jamais besoin d’écrire : on a besoin de parler. Et ceux qui tardent à écrire, c’est qu’ils n’ont pas envie de parler. Et ceux qui lisent n’ont pas envie d’écrire donc qu’ils se taisent.

Moi je parle. Je parle toujours. J’ai toujours envie de parler. Alors j’écris toujours et si je suis prolifique, ce n’est qu’à cause de ça... Peut-être que j’aime m’écouter parler. M’entendre parler...

Quand j’écris, je n’écris pas, je m’écoute écrire. Cela fait dans ma tête de nombreuses phrases que je me dicte à mi-voix, référant aux voix que j’ai déjà entendues. Celles de ma mère ; celles de mon père ; les voix s’entremêlent et c’est ça, le plaisir d’écrire : c’est le plaisir de parler en silence.

Dans le silence le plus parfait, crier alors que personne n’entend. Virer fou alors que personne ne vous voit. Tentez-le. Essayez-le. Je ne vois pas pourquoi tant de gens brillants (vous) n’écrivent pas. Cela fait dans vos têtes de nombreuses phrases référant aux voix que vous avez déjà entendues. Celles de vos mères ; celles de vos pères ; les voix s’entremêlent ce n’est que ça. Le plaisir d’écrire. Ce n’est que ça.

Je publierai un premier roman intitulé Plus écrivain que mort et alors, m’écouterez-vous davantage? Je débranche le téléphone.

J’ai besoin de parler. Je n’ai pas besoin d’écrire. Pourtant j’écris sans cesse. Les mots tapés sont autant de lettres que de laisse-moi réfléchir.

Son autant de lettres que d’écho de silence.

Je préfère que de laisse-moi réfléchir : les mots tapés sont autant de lettres que de laisse-moi réfléchir.

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Je ne veux ici que prouvez que je suis capable de faire les deux : à la fois grande poésie, à la fois grande simplicité d’âme. 

« Sont autant de lettres que d’écho de silence » étant de la grande poésie, j’ajoute aussitôt que je préfère « sont autant de lettres que de laisse-moi réfléchir ». 

C’est ce que j’essaie de prouver. 

2

Écrivez. Qu’est-ce que vous attendez. Je suis là devant mon ordi et je ne vois que les mots les miens qui se profilent mais les vôtres demeurent inconnus non lus absents comme de l’humeur absente.

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« Absents comme de l’humeur absente », mes contemporains jugeraient cela comme de la riche poésie alors que je la juge moyenne.

Réfutons-la avec de la simplicité :

« Absents comme toi absente », pourquoi pas.

3

Peu importe si vous écrivez à propos de la séparation de vos parents, de manière très sobre et très fade, peu importe si vous écrivez à propos de vos ressentiments de cette époque ; peu importe si vous écrivez sur la non-séparation de vos parents toujours ensemble et qui s’aiment, de manière très laide et très fausse, peu importe si vous écrivez à propos de votre fierté grasse de l’époque actuelle ;

Mais écrivez, tous, avant que la mort m’ouvre la bouche.

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« Avant que la mort m’ouvre la bouche », pourquoi pas. Selon mes contemporains, ce serait de la grande poésie.

Réfutons-la simplement :

« Avant que la mort me pisse aux lèvres », bah oui d’accord.

4

La poésie est une chose simple que seuls les simples peuvent produire. Les compliqués (ceux qui écrivent des dissertations super complexes avec des phrases complexes, gennnnnreeee dissertation sur la littérature de telle époque que tout le monde s’en fout parce que tout le monde meurt) sont incapables de la produire. Réjouissons-nous.

Car il faut se réjouir 
De la moindre entrave 
À l’habitude du creux
Lequel on se creuse sans cesse

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« Car il faut se réjouir
De la moindre bla bla
Bla bla bla
Lequel bla bla bla », bon d’accord pas d’accord.

Oui ça va j’ajoute.

« Car il faut se réjouir
comme le sourire
d’un dessin d’enfant », ça c’est meilleur.

5

Après tout cela je n’ai point de certitude que vous écriviez quoi que ce soit de valable, mais certes certitude que vous écrirez quelque chose ; et ce quelque chose sera à tout le moins quelque chose ; « Quelque chose, n’est-ce pas tout ce dont nous sommes avides? » (ça c’est riche)

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« Quelque chose n’importe quoi 
quelque chose de l’fun
rien de trop morose
pis on verra après

je le dis ce le c'est » 

(ça c’est pauvre mais 40 fois meilleur)